Aides de l’Etat aux organismes HLM : contrôle par l’ANCOLS des éventuelles surcompensations

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En application de la législation européenne, les aides d’État aux entreprises sont interdites en principe dans la mesure où elles peuvent conférer un avantage inéquitable à une entreprise par rapport à une autre, et par conséquent fausser la concurrence au sein de l’Union Européenne. Les pays de l’UE qui souhaitent accorder des aides à des entreprises ou certains secteurs d’activité doivent les notifier préalablement à la Commission européenne, à défaut ils s’exposent à des amendes.
Toutefois, dans certaines circonstances, les aides d’État sont autorisées et sont dispensées de notification à la Commission lorsqu’elles ont pour objet notamment de remplir des services d’intérêt économique général. A cet effet, La Commission européenne, a rendu une décision le 20 décembre 2011[1], qui fixe les règles qui doivent être respectées pour être exempté de notification et oblige à désigner un organisme responsable de leur contrôle.
Ainsi, en vertu de l’article L. 342-2 du code de la construction et de l’habitation, l’Ancols (l’Agence de Contrôle du Logement Social) a été chargée depuis 2014 de s’assurer que les aides apportées aux organismes HLM respectent les règles de la décision de la Communauté Européenne et ne sont pas supérieures à ce qui est nécessaire aux organismes HLM pour assumer leurs missions d’intérêt économique général.
Or, dans un référé du 3 décembre 2018 transmis au Premier ministre, la Cour des comptes déplorait l’absence de contrôle systématique par l’Ancols d’une surcompensation des aides d’État au logement social, absence qui exposait  l’État français à « un recours en manquement formé par la Commission devant la Cour de justice de l’Union européenne ».
Afin de remédier à cette carence, le conseil d’administration de l’Ancols a adopté le 23 janvier 2019 une délibération approuvant sa méthode de contrôle d’éventuelles surcompensations des aides d’État au logement. L’agence appliquera cette nouvelle méthode à compter du 1er avril prochain, contre la volonté des organismes HLM représentés par l’USH (Union Sociale de l’Habitat), ceux-ci refusant que le contrôle des aides octroyées et la détermination d’éventuelles surcompensations soient réalisées sur la situation financière globale de chaque opérateur HLM et non opération par opération. Pour justifier de cette opposition, l’USH rappelle que les aides au logement social en France sont des aides à l’investissement opération par opération et non des subventions de fonctionnement aux organismes et craint que la méthode porte préjudice aux organismes en bonne santé financière qui pourraient se voir contraints de rembourser des aides.
Pour justifier sa position, l’Ancols considère pour sa part qu’un contrôle « ex post » tel que recommandé par la Commission n’est en France pas pertinent, compte tenu du modèle de financement du logement social et de l’attribution du mandat de service d’intérêt économique général (SIEG) aux organismes HLM pour une durée indéterminée.
Dans sa réponse au référé, datée du 18 février 2019, le Premier ministre informe donc la Cour que la méthode adoptée comprend deux étapes. D’abord, « un diagnostic préliminaire, qui consiste en l’analyse de la situation économique et financière de l’organisme au vu de ses données et états financiers et comptables ». Ensuite, « un diagnostic complémentaire, qui consiste à procéder à un examen approfondi de la situation de l’organisme afin de confirmer, qualifier et évaluer une éventuelle surcompensation, après prise en compte, notamment des effets attendus des projets d’investissements déjà engagés ». Ce diagnostic complémentaire est accompagné, « le cas échéant, d’une proposition d’options possibles pour permettre à cet organisme de retrouver un bénéfice raisonnable ».
La situation de surcompensation sera vérifiée « sur la base de la combinaison d’un indicateur de marge d’exploitation (l’excédent brut d’exploitation divisé par le chiffre d’affaires net des charges récupérables) et d’un indicateur de rendement de l’actif (le résultat net comptable divisé par les immobilisations brutes nettes de l’endettement) ». Tout organisme appartenant au quatrième quartile au regard, cumulativement, de ces deux indicateurs, « fera en particulier l’objet d’un examen approfondi en vue de la détection d’une éventuelle surcompensation ».
Cette nouvelle méthode, s’appliquera aux contrôles lancés par l’Ancols à compter du 1er avril 2019. Pour autant, l’Ancols se laisse l’opportunité de tester une méthode alternative sur les dix-huit premiers mois d’application.

Frédérique Lahaye
Mars 2019


[1] (Décision 2012/21/UE) relative à l’application de l’article 106, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides d’État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général. https://publications.europa.eu/fr/publication-detail/-/publication/4158ddf0-dc57-45ba-bc8b-09969d3214c2/language-fr

Auteur/autrice

  • Frédérique Lahaye

    De formation juridique, Frédérique Lahaye a occupé de nombreux postes dans le domaine du logement. Après avoir débuté sa carrière dans le secteur associatif, elle l’a poursuivie à l’ANIL avant de participer au cabinet du Secrétaire d’Etat au Logement, Louis BESSON. Elle a été directrice juridique de l’ANAH, avant d’intégrer l’équipe d’un des principaux bailleurs de la Ville de PARIS, la RIVP. Enfin, après avoir été directrice du Logement et de l’Habitat de la Ville de PARIS, elle a occupé le poste de Conseillère logement du Premier ministre de 2014 à 2017. Elle préside actuellement le Groupement d’Intérêt Public Habitat et Intervention Sociales.

Une réflexion sur “Aides de l’Etat aux organismes HLM : contrôle par l’ANCOLS des éventuelles surcompensations

  • 12 mars 2019 à 09:53
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    …Intéressant ..Quid de la méthode « approfondie »?

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