Usufruit locatif social

L’usufruit locatif social (ULS) repose sur le démembrement temporaire de la propriété : la nue-propriété est achetée par un investisseur à long terme, alors que l’usufruit est acquis par un bailleur social pour une durée comprise entre 15 et 20 ans. À l’issue de cette période, l’investisseur devient plein propriétaire d’un logement qu’il récupère libre d’occupation et remis en état.
Trois mois avant la fin de l’usufruit, le bailleur social doit proposer au locataire un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités. Les biens doivent être restitués en bon état et libre d’occupation à la fin de l’usufruit. La convention d’usufruit intègre des engagements sur la maintenance des biens sur la durée de vie de l’usufruit et sur leur état lors de son extinction.
L’ULS a été lancé au début des années 2000. La loi ENL de 2006 encadre les règles de l’ULS en précisant les obligations des parties et les conditions de sortie du démembrement. Elle prévoit notamment une durée minimum de 15 ans et l’obligation de reloger un locataire respectant les plafonds de ressources. Un décret de mars 2009 a autorisé le bailleur à financer l’achat de l’usufruit en PLUS ou en PLA-I et, en 2014, la loi ALUR a élargi l’accès au dispositif en permettant à des véhicules collectifs d’épargne (SCPI, OPCI, SIIC,…) d’acquérir la nue-propriété.
Initialement destiné à des personnes physiques désireuses de se constituer un capital à long terme sur les marchés tendus en payant environ 60% du prix total du logement tout en bénéficiant d’avantages fiscaux (exonération d’IFI et déductibilité des intérêts d’emprunt pendant la durée du démembrement) et d’une probable valorisation à terme, l’ULS suscite également l’intérêt de quelques institutionnels. En outre, un projet de loi visant à créer un usufruit locatif social employeur (ULS-E) a été présenté l’an dernier[1].
Une modeste part des opérations est en effet financée en PLI, voire en libre ; on parle alors d’usufruit locatif intermédiaire (ULI) ou libre (ULL). Le financement des opérations est toutefois, depuis l’origine, majoritairement du PLS. Les locataires bénéficient alors du statut de locataire Hlm. Seul le dernier occupant avant l’extinction de l’usufruit voit son droit au maintien dans les lieux réduit. Il bénéficie toutefois d’une obligation de relogement par le bailleur social si son revenu ne dépasse pas le plafond de sa catégorie.
L’ULS permet la création d’une offre sociale dans des zones où la recherche du foncier est difficile et son accès très concurrentiel. En contrepartie, l’organisme ne dispose du logement que pendant une durée limitée et il devra gérer la fin du démembrement. L’obligation de relogement est sans doute de nature à freiner l’appétit des organismes. Il en va de même des collectivités : pendant la phase de démembrement, les logements financés en ULS sont pris en compte au titre de l’article 55 de la loi SRU pour la durée de l’usufruit plus cinq ans, mais, à l’échéance de 20 à 25 ans, ils ont vocation rejoindre le parc privé[2]. User sans abuser : logique pour un usufruit !

Claude Taffin – Septembre 2024


[1] Proposition de loi n°1127 portant création d’un usufruit locatif social employeur, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 25 avril 2023.

[2] Grégoire Fauconnier, « Des HLM à durée déterminée ? Le succès de l’Usufruit locatif social », Grégoire Fauconnier, Métropolitiques, novembre 2020.

Auteur/autrice

  • Claude Taffin

    Diplômé de l’Ecole Polytechnique et de l’Ecole Nationale de la Statistique et de l’Administration Economique, ancien administrateur de l’INSEE, Claude Taffin est consultant en économie du logement, notamment pour la Banque Mondiale. Il était auparavant (2011-16) directeur scientifique de l’association DINAMIC, créée par le Notariat pour développer l’exploitation de ses bases de données immobilières. Après l’INSEE (1974-91) où il a notamment dirigé la division «logement», il a été directeur de l’Observatoire Foncier et Immobilier du Crédit Foncier (1991-2000) puis des Etudes Economiques et Financières de l’Union Sociale pour l’Habitat (2000-08), avant de rejoindre la Banque Mondiale comme spécialiste senior en financement de l’habitat (2008-2011).

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