Télétravail : Un droit obtenu sans combat, une révolution qui ne fait que commencer….

Imprimer
« Grande démission », « détravail », « quiet quitting », « flemme »… les nouveaux concepts fleurissent ces derniers temps comme autant de mécanismes d’alerte et/ou de défense face à de profondes mutations du travail et de la société.
Cette temporalité, de même que le tropisme consistant à concentrer les interrogations avant tout sur les individus (la fameuse « valeur » travail au sens philosophique du terme) ne sont pas les fruits du hasard : la crise sanitaire et les mesures prises pour l’enrayer ont percuté de plein fouet un marché et une organisation de travail qui peinaient déjà à s’adapter à ces mutations.
Durant cette période historique inédite, la population active a, de fait, été globalement divisée en trois tiers. D’un côté ceux qui se sont vus mis en chômage partiel ou technique et ont pu de façon plus aiguë que jamais interroger (voire remettre en question) l’utilité de leur travail et/ou profiter de ce temps suspendu pour réfléchir à ce qu’ils y consacrent. Ceux, au contraire, travailleurs de première et deuxième lignes, désignés comme tels au moment du premier confinement, qui ont pu mesurer à quel point leurs emplois, tellement indispensables à la survie de la société, n’étaient décidément pas rémunérés ou traités en conséquence.
Ceux, enfin, qui ont pu poursuivre leurs activités en éprouvant une toute nouvelle façon de s’organiser : à distance de leurs lieux de travail, grâce aux outils numériques, de façon plus autonome et adaptée à leur rythme de vie en général.
De nouveau, rien de ce qui sous-tend tout cela ne date de 2020, mais c’est bien dans la foulée de ces expériences radicales qu’émergent aujourd’hui les débats et l’ampleur des interrogations sur un marché du travail de surcroît en bien meilleure santé qu’il ne l’a longtemps été.
Si l’on se concentre uniquement sur le télétravail, ce n’est ni plus ni moins que le modèle qui a dominé l’essentiel du siècle dernier qui se trouve en question. Une forme héritée du taylorisme empruntant au théâtre classique son unité de temps, de lieu et d’action, prônant un contrôle plus ou moins strict de toute la chaîne de création de valeur et une relative standardisation des rythmes et méthodes de travail. L’explosion de ce modèle sous l’effet du télétravail fait bouger de nombreuses lignes et engendre des conséquences majeures. Sur les entreprises mais aussi sur les modes de vie et sur la société de façon générale.
Tout se passe comme si, trois ans après le début de la pandémie, un compromis semblait avoir été trouvé.
Le télétravail comme une faveur : obtenue sans lutte sociale par des salariés reconnaissants d’enfin pouvoir mieux articuler leurs temps de vie ; concédée par les entreprises de plus ou moins bonne grâce. Mais le compromis est précaire, comme si, d’un côté, on redoutait de revenir en arrière et, de l’autre, on craignait d’aller trop loin… Dès lors les conséquences, enjeux et défis d’adaptation majeurs que cette nouvelle pratique impose semblent finalement abordés très prudemment. Autant de défis qui apparaissent pourtant bien en filigrane de notre Observatoire.

Méthodologie d’enquête

L’Observatoire du travail à distance s’appuie sur une enquête réalisée en ligne par L’ObSoCo sur le panel Bilendi[1] du 5 au 20 octobre 2022. L’étude a été conduite sur la base d’un échantillon de 3.000 actifs représentatif de la population active de France métropolitaine âgée de 18 à 67 ans avec un suréchantillonnage sur les télétravailleurs. 15 responsables RH et dirigeants.es d’entreprise ont également été interrogés sous la forme d’entretiens qualitatifs.

L’ObSoCo est une société d’études et de recherches spécialisée dans les mutations de la société et de la consommation. Notre approche consiste à développer de nouvelles grilles de lecture afin de décrypter les modes de vie des Français, repérer les émergences et comprendre les transformations tant des imaginaires et aspirations que du cadre de contraintes des citoyens et des consommateurs.

L’impossible retour en arrière

C’est d’abord une évidence que notre Observatoire permet de documenter : aucun retour en arrière ne semble possible sur le télétravail tant le phénomène est massif et s’aligne avec les attentes des salariés.
Si en 2019, la DARES comptabilisait 3% des actifs télétravaillant de façon régulière et 4% de manière occasionnelle, dès l’année suivante, utilisé comme un outil de lutte contre la pandémie, le télétravail a été expérimenté du jour au lendemain à grande échelle – par 37% des actifs – et de façon massive – 5 jours par semaine. Deux ans plus tard, 30% des actifs que nous avons interrogés sont toujours concernés : 6% à temps complet, et 24%, en mode que l’on qualifie désormais d’« hybride », alternent travail à distance et présence dans les locaux de leur entreprise. 1 actif sur 10 fait même partie d’un ménage où les deux conjoints télétravaillent.
S’il paraît bien difficile de revenir sur cette pratique, c’est d’abord parce qu’elle est véritablement plébiscitée par ceux qu’elle concerne.
Pas moins de 82% des télétravailleurs en sont satisfaits dont 37% très satisfaits.
Une satisfaction qui d’ailleurs augmente avec la fréquence du télétravail. Et se trouve également corrélée à la souplesse accordée par l’employeur dans les modalités de son organisation ainsi qu’aux conditions de logement. De sorte que si cette satisfaction se révèle légèrement moindre chez les catégories modestes ou les plus jeunes, il est permis de penser que c’est moins lié au principe du télétravail lui-même qu’aux conditions dans lesquelles il s’exerce.
D’ailleurs, seuls 3% des télétravailleurs souhaiteraient ne plus télétravailler et si 55% sont satisfaits de leur rythme actuel, 42% souhaiteraient pouvoir le faire davantage. Quand, aujourd’hui, le rythme est majoritairement de 1 à 2 jours télétravaillés, pour les deux tiers des télétravailleurs, il se situerait idéalement entre 2 et 3 jours.
Parallèlement et alors qu’un actif sur 5 dit avoir la possibilité de télétravailler mais ne pas le faire, certes, une proportion significative d’entre eux déclarent ne pas aimer le télétravail (28%), mais la plupart du temps la situation leur est imposée par leur employeur réticent à la mise en place du télétravail (38%), ou des conditions de logement qui ne leur permettent pas de travailler dans de bonnes conditions (22%).
Quant à ceux qui, pour finir, exercent une profession qui ne leur permet pas de télétravailler (soit la moitié des actifs), un quart d’entre eux indiquent qu’ils ont déjà pensé à changer d’entreprise ou de métier pour pouvoir accéder au télétravail. Ils sont même 1 sur 10 à y songer sérieusement et avoir entamé des démarches.
Autant d’attitudes qui font écho à ce qu’expriment la plupart des responsables RH que nous avons interrogés : le télétravail est devenu un atout d’attractivité important.

Extension du domaine des conditions de travail

Difficile de revenir en arrière quand les salariés, nombreux, qui y ont gouté en font désormais un critère de choix déterminant. Et pour cause : les conséquences du télétravail qu’il s’agisse de leur qualité de vie en général (85% de satisfaction), de leur vie familiale (83%) de leur qualité de vie au travail (81%), ou même de leur santé mentale (76%) ou motivation au travail (74%) sont, selon eux, très largement positives. La réduction des déplacements est sans conteste le bénéfice premier pour les télétravailleurs, devant la souplesse dans l’organisation des journées. Ils mettent également en avant ce qui en est le corollaire : le fait de se sentir moins fatigués, moins stressés et plus productifs. C’est bien simple, seuls 2% des télétravailleurs disent n’y trouver aucun bénéfice !
Les pourcentages sont massifs, mais attention cependant à ne pas sous-estimer ceux qui, par contraste, indiquent des situations plus nuancées, voire négatives. Le télétravail déplace le travail, il déplace donc aussi le sujet des conditions de travail. Et à cet égard tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. Au sens propre.
Certes, une très large majorité considèrent leur logement comme adapté au télétravail, en revanche pour près d’1 sur 5 ce n’est pas le cas.
Dans le détail, 34% des télétravailleurs disposent d’une pièce consacrée au télétravail, 31% d’un espace aménagé au sein d’une autre pièce, 21% s’installent provisoirement dans une pièce dévolue à d’autres fonctions (qu’il s’agisse du salon, de la chambre ou de la cuisine) et 13% varient selon les circonstances. Plus d’un tiers des salariés ne disposent donc pas pour travailler à domicile d’un espace permanent.
De même et si le confort semble de mise pour une large majorité de personnes que nous avons interrogées, il se trouve tout de même une forte minorité de télétravailleurs pour faire état d’insatisfactions sur un certain nombre de dimensions très concrètes. La connexion internet (17% insatisfaits), le meuble sur lequel ils télétravaillent (22%), l’aménagement de cet espace (23%) et leur chaise (31%) sont les plus souvent mentionnés. Autant d’éléments scrutés par les instances du personnel voire la médecine de travail in situ mais qui demeurent bien souvent dans l’angle mort du domicile.
Ce faisant, ceux qui ont les conditions de télétravail les plus favorables sont aussi ceux qui sont les plus aisés. A l’inverse des catégories les plus modestes, familles monoparentales et jeunes actifs très souvent moins bien installés.
Les gains considérables constatés ne doivent pas non plus occulter la difficulté à séparer espaces de vie et espace de travail.  Ainsi, 32% des télétravailleurs disent ne pas parvenir à déjeuner ailleurs que dans leur espace de travail, 23% à ranger leur équipement de travail une fois la journée terminée et 22% disent avoir du mal à définir des horaires / temps dédiés au travail et à les respecter. Des difficultés là encore plus fortes chez les actifs vivant dans de petits logements ou n’ayant pas de pièce dédiée au travail.
On le voit, à la faveur du télétravail, ce sont aussi les enjeux liés au logement qui se renouvèlent. Et s’inviteront probablement plus encore à l’avenir dans les entreprises. Car il convient d’ajouter à ces observations ce que nous mentionnions au départ : ceux qui pourraient et voudraient télétravailler mais ne le font pas, faute d’un logement adapté.
Sur ce point les réactions des responsables des ressources humaines sont très variées. Certains se montrent réellement préoccupés, là où d’autres projettent les choses dans l’avenir et cherchent des solutions pour une meilleure installation de leurs salariés à domicile. D’autres encore ne se posent pas la question ou ne veulent pas se la poser.
Les situations ont été traitées, vraiment ? A mesure que le temps passe et que le travail s’institutionnalise, les questionnements risquent pourtant de ressurgir. D’autant plus qu’un télétravailleur sur cinq estime que le travail à distance a un impact négatif sur son budget.
Au-delà des dépenses d’énergie, il semble en effet induire une hausse (réelle ou perçue) du budget alimentation, notamment chez ceux qui ont accès à la restauration collective lorsqu’ils sont en présentiel. Ce faisant, les télétravailleurs que nous avons interrogés trouveraient légitime que leur employeur participe aux frais induits par le travail à domicile :  concernant leur équipement informatique (81%), leurs dépenses en matière d’énergie (69%), l’achat de mobilier (68%) ou encore leur abonnement Internet (65%).
On le voit, nous ne sommes qu’aux prémices d’un sujet désormais au cœur des problématiques relatives aux conditions de travail dans les années à venir. Un sujet au centre des relations sociales pendant des décennies qui, donc, se déplace.

Une reconfiguration des territoires en germe

Les conséquences du télétravail vont au-delà du domicile dans son acception intérieure et porte aussi sur sa localisation. Nous le repérions depuis plusieurs années : alors que pendant longtemps le lieu d’habitation était le plus souvent fonction de son lieu de travail, le cadre de vie a, au cours des dernières années, émergé comme prioritaire. Quitte à s’éloigner ou envisager de s’éloigner de son travail ou en changer.
Avec le télétravail, un verrou saute, une opportunité s’ouvre, voire si le logement est trop petit, une nécessité s’impose d’en changer… Et c’est toute une géographie qui, de ce fait, pourrait de plus en s’en trouver bouleversée, au gré des aspirations individuelles.
Dans notre Observatoire, un actif sur cinq déclare avoir déménagé depuis la crise sanitaire. Une proportion plus élevée chez les jeunes (57% des 18-24 ans et 37% des 25-34 ans), les locataires et les habitants des grandes villes. La possibilité de télétravailler en a influencé 20%. 37% des actifs envisagent par ailleurs de déménager dans les prochaines années. La possibilité de télétravailler influence, là encore, le projet de 25% d’entre eux, et conditionne notamment le choix de la destination (19%) si ce n’est le projet lui-même (6%).
Comme pour les déménagements intervenus avant la crise sanitaire, le souhait de devenir propriétaire, la recherche d’un espace extérieur et d’un logement plus grand sont les principales motivations à ces projets de déménagement, au même titre que la recherche d’un cadre de vie plus calme, plus proche de la nature ou encore où le climat est agréable. Mais les motivations d’ordre professionnel sont davantage mises en avant, et notamment celles liées aux conditions de télétravail. Ainsi, 45% de ces actifs indiquent que le fait de pouvoir télétravailler dans de meilleures conditions contribue à leur souhait de déménager. Là encore, les plus jeunes, les habitants des grandes villes et les locataires sont davantage représentés parmi les actifs envisageant de déménager dans les années à venir.
De petits flux de mobilités résidentielles certes, mais qui représentent déjà des centaines de milliers d’actifs et pourraient s’amplifier à l’avenir. Ce qui constitue à la fois une menace pour certains territoires mais aussi une opportunité pour d’autres et induit également des effets sur la géographie du commerce et plus généralement des aménités. Sans parler évidemment de l’immobilier de bureaux. Côté RH, certains se posent d’ailleurs la question de la rationalisation ou de l’agencement des bureaux. Les réflexions s’accentuent aussi sur les espaces alternatifs : des lieux d’un genre nouveau pour maintenir les avantages du télétravail mais palier ses inconvénients. Si pour l’heure ces pratiques sont relativement limitées (entre 2% et 5% des actifs y ont recours selon les lieux), le corpoworking[2] ou le coworking suscitent l’intérêt : 25% des télétravailleurs interrogés indiquent qu’ils seraient prêts à y travailler régulièrement, et 19% de temps en temps.

Quel devenir pour l’entreprise en tant que corps social ?

Notre Observatoire le montre par la comparaison des télétravailleurs et non télétravailleurs : la pratique du travail à distance n’a absolument aucune influence sur l’importance accordée au travail dans sa vie. Elle a, en revanche, un réel impact sur la satisfaction à l’égard de son activité professionnelle. Ainsi, et toutes choses égales par ailleurs, sur la quasi-totalité des aspects de leur vie professionnelle, les télétravailleurs se montrent davantage satisfaits que les actifs n’ayant pas accès au télétravail.
Dans ce contexte, il est d’autant plus important de considérer qu’a contrario, d’un quart à près d’un tiers des actifs estiment que le télétravail a des conséquences négatives sur les interactions avec leur équipe (24%) et leurs collègues en général (28%). Un manque d’échanges entre collègues, avec son ou ses managers ou collaborateurs qui arrive d’ailleurs en tête des principales difficultés soulevées par le télétravail. Et pose donc aussi ultimement la question du lien social.
Avec le télétravail, les organisations sont davantage structurées en réseau, sur un modèle organique (impliquant davantage de responsabilités, mais aussi d’autonomie pour les salariés, ainsi qu’une organisation plus horizontale), plutôt que pyramidal. Le maintien des liens est plus complexe. Il y a de facto moins d’échanges et de relations, moins d’espace pour l’informel, les associations d’idées, la transmission non planifiée d’informations.  On le sait : la collaboration où chacun réalise une tâche à sa manière n’est pas la coopération ou chacun contribue à une tâche globale.
De surcroît, nous sommes encore dans une période où le télétravail concerne majoritairement des personnes qui avaient déjà appris à travailler ensemble auparavant, mais quid de la transmission, qu’il s’agisse de l’intégration de nouveaux arrivants, ou de la formation des jeunes ? Le management devient plus difficile. Comment organiser la proximité ? Comment aussi s’assurer de la légitimité des décisions ?
On le voit, le télétravail touche à des dimensions qui participent de la construction de l’expérience et de l’expertise individuelle comme du vécu et du récit collectif. Autant d’éléments indissociables du lien social et du bien-être au travail mais aussi du bon fonctionnement des structures elles-mêmes.
Alors que ces dernières années, de nombreux observateurs du monde du travail regrettaient l’individualisation de celui-ci, souvent au détriment des salariés, le télétravail accentue les choses, cette fois-ci à leur profit mais repose la question de l’interdépendance.
Sans compter la question du sens dont le besoin accru est une tendance de fond que la crise sanitaire a également accéléré. Aujourd’hui, une grande majorité des collaborateurs ont besoin de trouver une signification à leur travail, d’y voir une utilité et une forme de contribution à la société. Cela se décline dans leurs taches, la mission à laquelle ils participent, le projet d’entreprise auquel ils contribuent. Or avec le télétravail, il devient plus difficile de matérialiser celui-ci.
Les responsables des ressources humaines apparaissent bien conscients et mentionnent souvent leurs craintes que le collectif ne se délite, la nécessité de le maintenir… Certains aussi s’emploient à le repenser au prisme des nouvelles organisations.

Quid de l’égalité ?

Dernier point et non des moindres que soulève déjà et à terme le télétravail : le fait, qu’il soit inégalement réparti dans la population. Ainsi, 59% des actifs ayant un diplôme supérieur au niveau Bac +5 sont concernés pour 15% de ceux de niveau baccalauréat. Ce faisant, il est donc très marqué socialement : nettement plus répandu, devenant une norme sociale et dessinant de nouveaux modes de vie chez les catégories sociales aisées (51% des CSP+ pour 15% des CSP -). Et donc très marqué également sur le plan territorial et bien plus fréquent chez les urbains : 64% des actifs parisiens télétravaillent, 47% des habitants des grandes villes pour 17% des actifs vivant dans les communes rurales (qui, notons-le au passage, ont de surcroît un temps de transport quotidien important).
Ces inégalités d’accès au télétravail pèsent d’autant plus lourd que ceux qui n’en ont pas la possibilité sont souvent soumis – et de plus en en plus – à l’exacte inverse en termes d’autonomie, de souplesse et possibilités d’équilibrer vie professionnelle et vie privée. Ceci est vrai pour des professions aussi diverses que celles du secteur médico-sanitaire, aides à la personne, mais aussi caissiers et au-delà une bonne partie des ouvriers et employés… Pour tous ceux-là, au contraire, le travail rime souvent avec horaires décalés, cadencés, temps d’attentes… Sachant qu’une partie de ces travailleurs de première et deuxième ligne, n’ont pas forcément vu leurs conditions de travail et de rémunération évoluer, ni leur confort de vie s’améliorer.
En parallèle on constate aussi l’émergence d’une catégorie de travailleurs encore plus fragile socialement, rattachés aux plateformes digitales qui se développent à mesure que le e-commerce monte en puissance et pour qui le travail s’effectue à la tâche, tel le journalier du début du siècle dernier.
Pour tous ceux-là, les contraintes temporelles – qui souvent s’accentuent – contrastent donc avec celles qui, en partie se desserrent pour ceux qui ont la possibilité de télétravailler. Asymétries qui renforcent toutes les autres : temps et coûts de transport, autonomie dans le travail, articulation vie personnelle/professionnelle, possibilité de mobilité résidentielle, etc…
On le voit, cette première saison de mise en place du télétravail en annonce bien d’autres. Des enjeux aussi importants que multiples et des défis d’adaptation que notre observatoire met à jour. En redistribuant différemment les lieux et le temps, le télétravail a percuté les modes de vie et fait bouger les lignes de la mobilité, du logement, des territoires… A fortiori les façons de travailler. En cela, le télétravail est comme une bombe à fragmentation lente d’un modèle appelé à se réinventer.

Guénaëlle Gault et Agnès Crozet – Novembre 2023


[1] Bilendi est l’un des leaders européens de la collecte de données.
Pour accéder à l’étude dans son intégralité

[2] Corpoworking : Né de la fusion entre les termes « corporate » et « coworking », le « corpoworking » désigne la création d’un espace de travail partagé interne à une entreprise. L’objectif de l’espace, ouvert et convivial, est de favoriser l’innovation et de créer un écosystème dynamique autour d’une communauté. A cet effet, ce dernier est non seulement ouvert aux équipes en interne, mais aussi aux personnes extérieures à la société, comme les indépendants, les clients ou les prestataires.

Auteurs/autrices

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *