La politique du logement est fondée sur un diagnostic erroné
L’économiste n’a pas normalement à discuter les objectifs d’une politique. Il est fondé en revanche à discuter le diagnostic sur lequel elle est fondée et à s’interroger sur l’argumentation économique qui lui est donnée. Le diagnostic porté depuis la crise de 2008 est celui d’une tension sur le marché du logement qui justifierait une augmentation de la production afin de faire baisser les prix, comme l’a évoqué le Président de la République le 15 octobre 2017. On montre que ce diagnostic est erroné et que, par conséquent, la politique du logement sur lequel elle est fondée ne peut être ni efficace ni pertinente.
Une offre de logements excédentaire
Le diagnostic sur lequel repose la politique du logement depuis 10 ans est celui d’une tension sur le marché par insuffisance de l’offre, ce qui justifierait que l’on construise davantage. Ce diagnostic est erroné. Il est fondé sur le constat du doublement des prix depuis la fin des années 90. Mais si c’était une tension du marché qui avait conduit au doublement des prix, elle aurait aussi conduit à une croissance du prix des loyers dans des proportions comparables, puisque la location est toujours possible quand l’acquisition d’un bien est trop chère. Or les données de l’INSEE montrent que l’indice du prix des loyers a évolué comme l’indice général des prix depuis 20 ans, ainsi qu’il apparaît sur le graphique 1.
Le fait majeur de ces 20 dernières années est donc la distorsion entre l’évolution du prix des biens et celle du prix des loyers.
Un indicateur quantitatif de l’état du marché est le solde entre l’offre et la demande. De ce point de vue l’idée d’une tension est également contredite par l’explosion du nombre de logements vacants. Il a augmenté de près de 50% depuis 10 ans pour atteindre au 1er janvier 2016 près de 3 millions de logements selon l’INSEE (cf. graphique 2), alors même que le nombre de logements occupés continuait à augmenter. L’accroissement de la vacance ne résulte donc pas d’une diminution de l’occupation du parc. Se pose alors la question de savoir de quelle nature est cette vacance.
La nature de la vacance
La nature de la vacance des logements s’interprète assez commodément par comparaison avec un autre marché, celui du travail. Comme le marché du travail, le marché du logement est un marché de stock où la grande majorité des personnes, – des logements-, sont occupé(e)s, et où la grande majorité des emplois, – des personnes-, sont pourvu(e)s. Les ajustements s’opèrent à la marge notamment sur les flux entrants et sortants.
L’existence d’un nombre important de chômeurs ou de logements vacants est la manifestation d’un excès d’offre de travail (celle qui émane des travailleurs) et de logements. Le chômage, comme la vacance, se manifestent partout en France. Ils sont toutefois plus ou moins accentués selon les zones. Par exemple, entre 2009 et 2014, le nombre de logements vacants en France a augmenté de 20%, mais « seulement » de 10% en Ile-de-France. Cela est dû au fait que le rythme de construction y a été un peu moins soutenu au regard de l’évolution démographique. C’est ce qu’on a montré en rapprochant le volume de construction des soldes naturel et migratoire (1) . Inversement, dans la ville de Lille, zone réputée tendue, le nombre de logements vacants s’est accru de 24%.
Globalement le taux de logements vacants dans les 15 premières communes de France en 2013 est de 8,2% alors que la moyenne nationale « n’est que » de 7,8%.
Le marché fonctionne donc selon le principe des vases communicants. Ainsi depuis 10 ans, entre le tiers et le quart de la construction neuve vide des logements existants. Le secteur HLM qui offre des logements à un tarif inférieur à celui du marché fait également l’objet d’une demande soutenue. Cette demande est plus qualitative que quantitative puisque selon l’Enquête Nationale Logement 2013 elle émane pour plus de la moitié de ménages qui logent déjà dans le secteur HLM et qui ont souvent refusé des offres précédentes comme le signalent les rapports de la Miilos, puis de l’ANCOLS. Mais l’offre HLM attire aussi des locataires du secteur libre.
Le caractère hétérogène des logements fait aussi que lorsqu’il y a un excédent de logements, les ménages ne peuvent pas se partager cet excédent. Ce caractère hétérogène rend aussi les logements non parfaitement substituables. Deux petits logements ne se substituent pas parfaitement à un plus grand. En cas de d’inadéquation les délais de réallocations des ménages dans le parc sont longs. Finalement, l’offre de logement est pléthorique, ce qui rend les ménages particulièrement sélectifs.
L’excédent d’offre interroge sur la pertinence du soutien de l’activité de construction par les pouvoirs publics. Par comparaison avec le marché du travail, s’il est peu pertinent de faire venir 250 000 travailleurs détachés quand on a plus de 3 millions de chômeurs, on peut se demander s’il est pertinent de construire plus de 300 000 logements par an quand on a près de 3 millions de logements vacants. Dans ces conditions, envisager un choc d’offre alors que l’offre est déjà pléthorique est sans fondement économique.
Un autre indicateur de l’excès de construction est la comparaison des rythmes de croissance de la population et du parc de logement : Le rythme actuel de construction accroît le parc de logements au taux de 1% par an alors que la population ne s’accroît que d’½ % par an. Certes, elle s’étale dans les logements existants, mais elle est loin de pouvoir les occuper tous. Par comparaison, le Royaume-Uni qui a la même population et le même nombre de ménages construit depuis 20 ans au rythme de 200 000 logements par an.
Il est donc illusoire de croire que l’accroissement des volumes de construction fera baisser le prix des logements, parce que depuis 15 ans on est déjà dans une situation de sur-offre sans que le prix des logements ait significativement baissé. Ce qui s’est passé est un cycle macroéconomique des plus classiques qui a fortement concerné l’immobilier. Après une phase d’expansion des prix et des volumes de la fin des années 1990 à 2007, a succédé une crise de surproduction en 2008-2009. Depuis cette période, les pouvoirs publics français ont traité la crise en soutenant la production par des mesures fiscales incitatives. Cette politique ne fait qu’accentuer la surproduction.
Un autre argument qui pourrait justifier le soutien de l’activité de construction est le renouvellement et l’amélioration du parc. Deux questions se posent alors. N’est-il pas plus économique de rénover l’existant plutôt que de construire du neuf, dont les emprises foncières sont négatives pour l’environnement. L’autre question est : que fait-on des logements qui vont rester durablement vacants ? Se pose aussi la question sociale que va soulever la nouvelle euthanasie des rentiers par la perte de valeur de leur patrimoine immobilier, indépendamment des questions fiscales.
Un impact macroéconomique de la construction surestimé
Une autre justification au soutien de l’activité de construction est celle de son impact sur l’activité économique générale. Cet impact est très largement surestimé.
Commençons par observer que si la subvention de l’Etat représente un pourcentage du prix du logement, comme les prix ont doublé, il faut mettre deux fois plus d’argent public pour obtenir le même résultat. Aucune autre aide publique n’a vu son rendement diminuer de dans ces proportions.
Par ailleurs l’impact macroéconomique de la construction de logements neufs est modéré. Celle-ci ne représente que le quart de l’activité de la branche construction, à côté des travaux publics, de la construction de bâtiments non résidentiels et des travaux sur les logements existants qui représentent autant en volume que la construction neuve.
En outre une partie de l’aide publique sert à financer la charge foncière, laquelle a d’ailleurs absorbé l’essentiel de la hausse des prix. On ne sait pas ce que font les propriétaires fonciers du produit de la vente de leurs terrains, mais on peut penser qu’ils l’utilisent moins à des dépenses de consommation qu’à des arbitrages financiers sans effet significatif sur l’activité économique.
Quant à l’effet multiplicateur de la construction sur le reste de l’économie, la branche se situe au 12ème rang des activités économiques sur 17, derrière toutes les branches tertiaires et avant les branches industrielles (2).
En définitive l’effet multiplicateur du soutien de la construction de logements neufs est médiocre.
Une autre justification du soutien de la construction pourrait être l’amélioration du parc par son renouvellement. L’allègement des normes de construction irait bien entendu à l’encontre de cette finalité. En tout état de cause cela laisse entier le problème de l’utilisation des logements vacants. Economiquement il est le plus souvent moins coûteux de rénover que de construire à neuf puisqu’on n’a pas à détruire ou à financer le foncier.
Le doublement des prix est dû à des facteurs financiers
Comme ce n’est pas une insuffisance de l’offre qui explique le doublement des prix, l’accroissement de la production a peu d’effet sur la baisse des prix. Ce qui explique le doublement des prix et sa distorsion avec l’évolution des loyers relève de facteurs financiers.
L’analyse économique enseigne que la valeur patrimoniale d’un actif est la capitalisation des revenus qu’il génère, en l’occurrence les loyers. Comme les loyers n’ont pas augmenté, c’est le coefficient de capitalisation qui a joué. Ce taux est l’inverse du taux d’intérêt. Autrement dit, quand le taux d’intérêt est divisé par deux le prix des biens double. Ce phénomène joue également sur les autres formes d’actifs, notamment les actifs financiers. C’est la même raison qui a fait doubler le cours des actions depuis 1996 comme celui des logements, comme le montre le graphique 3. Ce graphique montre aussi que le prix des actifs financiers est plus volatil, volatilité qui provient de celle des revenus du capital et que ne connaissent pas les loyers.
La flambée identique des prix des actions et des prix de l’immobilier plaide plutôt en faveur d’un traitement identique en ce qui concerne la fiscalité sur le patrimoine.
Les facteurs financiers jouent aussi du côté de la capacité d’endettement des ménages. Avec la baisse des taux et l’allongement de la durée des prêts les ménages ont pu s’endetter deux fois plus avec un taux d’effort à peu près stable. Selon les données de l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution, le taux d’effort moyen est passé de 27,8% en 2001 à 29,5% en 2016. Les ménages se présentent sur le marché du logement avec une capacité à payer deux fois plus élevée. Sur un marché de stock comme l’est principalement le marché du logement, ils peuvent offrir des prix deux fois plus élevés.
Ceci explique que le phénomène d’augmentation des prix ait été très général dans le monde. Le cas particulier de l’Allemagne manifeste les perspectives défavorables sur l’évolution des loyers du fait d’une évolution démographique dépressive mis à part le sursaut dû à l’accueil de réfugiés.
Les conditions de financement très favorables dépendent in fine de la politique monétaire de la Banque Centrale Européenne. Comme il paraît vraisemblable qu’elles ne dureront pas, on peut s’attendre à une baisse du prix des biens. En définitive l’avenir du marché immobilier s’annonce donc plus sombre pour les propriétaires immobiliers avec une vacance croissante et une perspective de diminution de la valeur patrimoniale des biens.
Excellent article, merci
Merci pour votre appréciation.
Merci pour cet article.
Deux remarques :
Lorsque vous comparez indice des prix et indice des loyers, n’y a-t-il pas un problème à comparer une variable de flux et une variable de stock ? En effet, l’indice des prix est basé sur les ventes enregistrées par les notaires trimestriellement. Il s’agit donc d’un indice de flux. L’indice des loyers, composante de l’Indice des prix à la consommation, repose (si je me rappelle bien) sur une enquête auprès des ménages pour connaitre le montant effectif de leur loyer (en stock). Or celui-ci n’est absolument pas représentatif du loyer de marché en flux. En effet, les loyers de stock connaissent une actualisation encadrée par l’IRL. Pour avoir jeté un œil aux données de l’OLAP, il est fréquent d’avoir des écarts de plus de 50% entre deux locataires d’un même immeuble, à logement comparable, à la différence que l’un des deux est entré dans son logement 15-20 ans avant l’autre. Si vous comparez les prix de marché avec les loyers de marché (malheureusement aucun indice INSEE n’existe, mais ceux qui ont accès aux données OLAP ou ENL2013 peuvent restreindre aux emménagés récents), vous vous rendrez compte que l’évolution des prix et des loyers en flux sont à peu près comparables.
Seconde remarque : il est clair qu’aucun expert sérieux ne croit à l’insuffisance de l’offre. La seule raison valable pour le maintien des dispositifs d’incitation fiscale est le soutien à l’emploi des grands groupes de construction.
J’avais bon espoir que cela change lorsque sont parues les premières études montrant que le ratio « emploi créé »/ »€ investit » était plus élevé sur la réhabilitation que sur le neuf, mais apparemment la CAPEB ne jouit pas des mêmes relais que la FFB en hauts lieux.
Merci pour vos réflexions.
L’indice des loyers de l’INSEE inclut aussi les flux de nouveaux locataires, de l’ordre du tiers des enquêtés. Pour autant faut-il se limiter à ces seuls ménages ?
Quant aux données de l’OLAP ou des ENL elles sont fondées sur les loyers au m². Cette mesure n’est pas une bonne mesure du prix des loyers, parce qu’on contrôle mal la surface et pas du tout la qualité. Or celle-ci a considérablement augmenté du fait des travaux de rénovation et de la construction de logements neufs. C’est d’ailleurs en déflatant les loyers au m² par l’indice des loyers que le Compte du Logement mesure l’evolution de la qualité.
Bref le partage prix-volume en matière de logement n’est pas aisé….
Je pense qu’il faut comparer deux variables de flux entre elles ou deux variables de stock entre elles, mais ne pas les mélanger. Le problème, c’est que les loyers ne sont connus quasiment que par le stock (l’indice INSEE que vous évoquez) et les prix que par le flux (indice notaires).
Il est paradoxal de considérer avec ces indicateurs que les loyers ont stagné sur les 20 dernières années alors même que l’encadrement des loyers (discutable par ailleurs) était justifié par une envolée des loyers ! En réalité, les loyers de stock sont restés relativement stables alors que les loyers de marché se sont envolés parallèlement aux prix.
Quant aux données ENL, il est vrai que tout le monde n’a pas la chance d’avoir accès à la base de données complète. Je peux vous assurer qu’il y a assez de variables pour en extraire des choses intéressantes : outre le loyer et la surface, on a accès à toutes les infos sur le quartier et la qualité du logement. Le dictionnaire des variables de l’ENL 2006 est disponible ici : https://www.cmh.ens.fr/adisp/documents/lil-0410/lil-0410dcod.pdf
L’ENL pêche plutôt par le faible nombre d’enquêtés que par la qualité des informations fournies !
Pour en revenir au sujet, il faut mentionner que le logement constitue une valeur refuge, avec les processus irrationnels qui l’entourent (quoique l’irrationalité puisse tout de même être modélisée).
Il apparaît effectivement salutaire de bien cerner les causes de la flambée (durable) des prix et de dissiper l’illusion d’une baisse qu’occasionnerait un hypothétique « choc d’offre » (relance de la construction).
Pour autant, plusieurs points laissent perplexe dans l’argumentation proposée ici.
Tout d’abord, l’affirmation péremptoire et répétée d’une « offre pléthorique », qui serait attestée par « l’explosion du nombre de logements vacants » mériterait une démonstration plus convaincante. Outre le fait que l’INSEE ne fait pas mention d’une telle explosion, mais évoque dans une note récente un taux de vacance « proche en 2016 de celui de 1986 » (article de Céline Arnold), l’auteur sait parfaitement qu’une vacance élevée dans certaines régions peut coexister avec une pénurie et d’importantes tensions dans d’autres territoires.
Or pour reprendre le parallèle suggéré par l’auteur entre marché du travail et marché du logement, à la différence des demandeurs d’emplois, les logements vacants sont eux parfaitement immobiles…
En Île-de-France, ce taux de vacance est stable aux alentours de 6% depuis plusieurs décennies, et les tensions restent vives en dépit de la reprise récente de la construction.
Enfin dernière réflexion concernant la stabilité des loyers comparée à l’envolée des prix de vente, peut-être faut-il chercher à cette modération des bailleurs une autre cause : par exemple dans la lente mais régulière dégradation du niveau de ressource des locataires, dont le revenu représentait 85% du revenu moyen il y a 20 ans et seulement 70% aujourd’hui (Source ENL 1992 et 2013).
Merci de vos commentaires.
Les données de vacance que j’ai utilisées sont celles de l’INSEE. J’ai travaillé sur les données en nombre parce que la production de logements est habituellement mesurée ainsi et qu’il paraît cohérent de faire le compte du solde des entrées de logements et des sorties.
Les appréciations que je fais sont bien évidemment personnelles. Pour évaluer le degré d’emphase, on peut essayer d’imaginer les appréciations qui seraient portées sur le chomage s’il avait crû de 50% en 10 ans. Le nombre de logements vacants est de même nature.
La vacance est partout, mais différentiée spatialement, comme le chômage. En évolution, entre 2009 et 2014 (base communale de l’INSEE), le nombre de logements vacants a crû de 20% dans la France entière mais « seulement » de 10% en Ile-de-France. Encore ce taux est-il lui -même différencié à l’intérieur de la région parisienne. La vacance a augmenté de 20% en seconde couronne, de 10% en première couronne et de 0% à Paris. Le nombre de logements vacants à Paris intra muros est de plus de 100000 en 2014, soit 7,8%.
Quant à l’évolution du niveau de ressources des locataires dans les ENL, il s’agit d’un effet de structure. Les locataires les plus aisés ont accédé à la propriété. Pour autant les locataires restant n’ont pas vu leur taux d’effort augmenter comme le montrent les données du dispositif ERCV de l’INSEE.
Concernant les logements vacants, je pense qu’il faut analyser avec prudence les évolutions de leur dénombrement qui font suite au changement de méthode du recensement. Par ailleurs, il me semble excessif de réduire l’existence de logements sont vacants au comportement des bailleurs (refus de louer ou loyers excessifs) ou des locataires.
Il existe de multiples autres raisons, à commencer par celles qui tiennent à l’inévitable délai de vacance entre deux occupants successifs ; à la réalisation de travaux de réhabilitation ; aux délais de commercialisation des logements neufs… Voir à ce propos l’article de Jean Bosvieux sur ce site, article qui reste d’actualité.
Enfin, Concernant le niveau de ressources des locataires, OK pour la stabilité du taux d’effort des locataires restants, mais les plus fortunés qui accèdent à la propriété sont remplacés par des nouveaux venus et notamment des jeunes, dont le niveau de ressources est inférieur à celui des générations précédentes. Globalement, les bailleurs sont donc bien face à une clientèle moins solvable et cela n’est pas sans effet sur le niveau des loyers… et/ou des APL
Le parallèle entre travailleurs détachés vs chômeurs et construction
neuve vs logements vacants est intéressant.
On a 3 millions de chômeurs qui n’acceptent pas le travail/salaire que
font les travailleurs détachés, ou bien que les employeurs refusent
pour un rendement/risque insuffisant.
On a 3 millions de logements vacants que les propriétaires refusent de
louer pour un rendement/risque insuffisant, ou bien que les locataires
refusent pour une qualité/loyer (biens inférieurs).
Lorsqu’on trouve de nombreux biens ou acteurs qui se situent hors
marché, il est vain de dire que c’est la faute du marché.
Une cause importante de la hausse des prix des logements provient de
la hausse du coût des logements neufs, due principalement à la hausse
du prix (doublé en 20 ans) des terrains constructibles conséquence de
la réduction drastique des zones constructibles (suppression des POS,
PLU ‘écologiques’).
Accessoirement, la hausse du niveau de qualité des logements neufs
(normes, RT2012) ainsi que la hausse des capacités d’emprunt ont aussi
contribué, mais cela se retrouve dans tous les secteurs.
Rénover complètement un logement de 50 ans revient aussi cher que
construire du neuf, que ce soit en coût de travaux comme en prix de
sortie.
Les justifications d’une intervention de l’état sur le marché du
logement sont toujours discutables, et le résultat à long terme de ces
interventions est souvent discutable aussi.
Merci pour vos commentaires.
Je partage vos réflexions sur le refus de location des bailleurs ou des locataires. Ce que révèle la possibilité de ce réfus, c’est d’abord que le nombre de logements est suffisant pour que les locataires puissent faire un choix et que les bailleurs puissent se dispenser de mettre leur logement sur le marché.
En revanche je ne partage pas votre analyse sur le rôle des coûts fonciers dans l’augementation des prix. Ce qu’expose la théorie économique est que ce sont les loyers anticipés qui déterminent les prix par le mécanisme de la Valeur Actualisée Nette. Et ce sont les prix de vente anticipés qui déterminent les prix fonciers par le mécanisme que les promoteurs appelent « compte à rebours ». Les données montrent que le foncier a absorbé la plus grande part de la hausse des prix.
Quand on a affaire à une opération de rénovation, le même mécanisme est à l’oeuvre. Il conduit à la détermination du prix d’acquisition du bien à rénover.
La hausse du prix des terrains constructibles serait due à la grenellisation des PLU ? On ne demande qu’à le croire, mais encore faudrait-il qu’une étude sérieuse vienne le confirmer. Les POS que je vois actuellement en révision prévoient en effet la fermeture de nombreuses zones à urbaniser, mais celle-ci étaient souvent ouvertes depuis les années 80 et n’ont pas vu se développer de programme immobilier pour autant.
La démonstration de Didier Cornuel est difficilement contestable pour l’essentiel. Il rappelle à juste titre les incidences majeures sur la hausse des prix immobiliers, de l’abondance de liquidité et de la baisse des taux d’intérêt favorisés par la BCE, (alors même que le niveau réel des taux reste positif). Les orientations gouvernementales en matière de politique de logement, traduisent finalement surtout un manque abyssal de culture concernant le domaine et les connaissances disponibles. De plus, aux pertes économiques créés par l’excès d’offre neuve, s’ajoutent malheureusement trop souvent les déséconomies causées par les carences d’investissement dans l’urbanisme, les infrastructures et les équipements des zones de construction nouvelle.
Bonjour,
J’ai lu avec intérêt votre billet. Comme vous, je suis convaincu que le diagnostic est erroné et que la politique proposé par En Marche ne résoudra pas le problème.
Il y a quelque chose qui est mal compris dans la formation du prix des logements, du montant des loyers, dans la rencontre entre l’offre et la demande, comme s’il y avait une segmentation du marché qui doit être mis en évidence pour pouvoir avancer.
Concernant Paris intramuros, la petite et la grande couronne, je me pose les questions suivantes :
– A qui appartiennent les logements vacants, comment ces logements ont-ils atterri dans le patrimoine de leur propriétaire ?
– Quel est l’état de ces logements par rapport aux autres logements proposés soit à la vente soit à la location ?
Cordialement et merci pour votre réponse. Pourriez-vous me prévenir par mail de votre réponse afin que je puisse la consulter sur le site politique du logement.
yves.vermont.info@gmail.com.
Merci de vos commentaires.
L’erreur de diagnostic est antérieure à l’équipe présidentielle actuelle. Elle fondait déjà l’objectif de construction de 500000 logements par an. Elle me paraît remonter à la crise de 2008.
Quant aux caractéristiques des logements vacants, je crains que l’on n’ait pas beaucoup d’informations sur leurs détenteurs et leur état; Ce qui s’expliquerait par le peu d’intérêt qu’on leur porte.
Mais des statisticiens ont peut être d’autres informations.
Je vous remercie. Je suis d’accord avec vous l’erreur de diagnostic est antérieure à l’équipe présidentielle qui la reprise « par erreur ». J’avais lu quelques part que le besoin réel était de 350.000 logements et qu’il fallait en ajouter 80.000 par an pour combler dix année de construction insuffisante.
Je ne fais citer que les chiffres, sans porter de jugement dessus.
Cordialement
Les « besoins » font référence à une norme, par définition subjective ou politique.
L’économiste se réfère au marché. Actuellement on peut constater que l’offre globale de logement excède la demande et que cela s’accentue. Peut-être est cela que veulent les politiques ?.
Voici la thèse que je défends intuitivement et sans preuve.
Qu’en pensez-vous ?
Je crains que l’offre neuve au prix du marché ne rencontre pas une demande suffisante pour la qualité et le prix souhaité, ce qui limite les ouvertures de chantier. Dit autrement : le nombre de ménages candidats à 10.000 € le m2 n’est pas extensible à l’infini.
Les logements anciens ou vacants ne répondent pas aujourd’hui à la demande : ils sont soit décrépits, peu attractifs, soit dans des quartiers qui n’ont pas la cote. Même s’ils ne sont pas « chers », ils ne répondent pas à la demande solvable qui espèrent mieux pour le même prix ou sont rebutés par les travaux de rénovation à faire. Les couples salariés n’ont pas le temps, n’ont pas confiance dans les artisans. C’est un vrai problème.
C’est la même chose côté locataires. Les HLM offrent un bon rapport qualité prix que l’on ne retrouve pas au niveau des logements vacants. Ces locataires préfèrent rester dans les lieux, ou, s’ils ne sont pas dans les lieux faire la queue côté HLM. Un effet d’aubaine négatif qui se retourne contre la politique du logement car les sociétés HLM ne peuvent pas suivre.
Qu’en pensez-vous ?
Bonjour,
merci pour votre analyse très intéressante et qui interpelle. Je trouve cela passionnant et aussi me permet de vous partager des interrogations.
Je vous rejoins sur le fait que l’augmentation des prix ne peut s’analyser simplement par une absence d’offre, et que le diagnostic est mauvais. La disponibilité de finance et les politiques de soutien à la demande sont des facteurs inflationnistes peu mis en avant en général. Si l’on s’accorde à dire que le choc d’offre n’apporte pas de réponse sur la baisse des prix, quels sont les outils pour baisser ces prix – peut-être ne le faut-il pas ?
Pour revenir aux effets d’un choc d’offre sur les prix, j’ai en tête le PLH 2015-2020 de Rennes métropole, qui met en avant un choc d’offre ayant permis à Rennes de passer de la 4ème à la 12ème place dans le classement des villes les plus chères de France (page 13). Il y a d’autres facteurs à étudier, néanmoins le fait d’avoir produit une offre neuve diversifiée, avec un travail sur les prix de sortie, semble avoir a minima évité une hausse des prix, est-ce plausible ?
Concernant la vacance, je suppose que si le parc vacant progresse, c’est qu’il y a un choix de meilleurs logements mais aussi des territoires en déclin avec trop de logement par rapport aux besoins. L’offre est importante, mais pas adaptée en terme de localisation à l’échelle nationale et de qualité. Dès lors il faut un changement profond pour soutenir la rénovation, pour qu’au final les logements vacants deviennent aussi attractif que le neuf. Au final, je vois deux points : si le choc d’offre a peu d’effets sur les prix, ne reste-t-il pas pour autant nécessaire de soutenir la production neuve et de construire pour disposer d’assez de logements de qualité quand la mobilisation de logements vacants est une option limitée ? Ce qui est lié au second : si l’on veut mobiliser les logements vacants, faut-il réduire les aides à la production neuve au profit de la rénovation, en ciblant uniquement le soutien au neuf dans les zones où cela est nécessaire (croissance démographique, sur-occupation)
Merci d’avance pour vos éclairages et conseils pour améliorer ces réflexions.
Ps : votre référence au Royaume-Uni serait à creuser, car dans leur cas il semble bien qu’il y ait un volume de construction trop faible par rapport à l’évolution démographique.
Merci de vos réflexions.
La politique du logement depuis la crise peut se comprendre comme une action contracyclique de soutien de l’activité économique. L’action budgétaire vise le soutien à l’investissement logement, l’action monétaire de la BCE vise, ou a pour effet, le soutien des prix. Les prix baisseront prochainement quand la politique monétaire sera moins expansioniste, pas du fait de l’accroissement de la production.
Concernant le choix entre rénovation et neuf, c’est un choix politique. On peut choisir de renouveler le parc plus ou moins rapidement. Les incitations financières ont pour finalité d’orienter les ménages dans une direction qu’ils ne choisiraient pas nécessairement sans aide. Concrètement un logement ancien rénové est peut-être moins attractif qu’un logement neuf. Mais cela coûte moins cher et limite l’extension des emprises foncières.
Quant à la situation de Rennes je ne la connais pas. Il faut voir si l’évolution que vous évoquez concerne la seule ville de Rennes ou l’agglo, c’est-à-dire s’il n’y a pas une déformation de la courbe des prix au sein de l’agglo. C’est ce qu’on constate en tout cas pour l’agglomération parisienne.