Titre
L’habitat participatif au prisme de ses acteurs : une analyse des mécanismes d’institutionnalisation et des effets relationnels appuyée sur deux opérations lilloises
Université
Lille 1
Date de soutenance
12/12/2018
Directeur/trice de thèse
Abdelhafid Hammouche
Résumé
Cette thèse porte sur le processus d’institutionnalisation de l’habitat participatif, mettant en question la conjonction d’intérêt des acteurs associatifs et politiques qu’il connait depuis le début des années 2010. Ces initiatives citoyennes, apparues vers le milieu des années 2000 sous des appellations diverses, se sont unifiées sous le vocable « habitat participatif » en 2010, manifestant ainsi la volonté d’apparaitre en un mouvement unique et revendicatif de valeurs sociales et environnementales accrues par rapport au parc de logement traditionnel. Ces opérations ne sont cependant pas les premières du genre avec des formes proches de projets émergeants dès la fin des années 1970, jusqu’au milieu des années 1990 sous des appellations diverses, guidés par l’action collective : habitat groupé autogéré, habitat groupé ou encore habitat partagé. Au-delà de la différence générationnelle, ce travail met l’accent sur les mécanismes de transformations temporels, sociaux et politiques du mouvement de l’habitat participatif, ainsi que sur leurs effets sur les acteurs impliqués. Durant cinq ans, l’étude s’est nourrie d’une enquête sur deux opérations de la Métropole Lilloise ayant émergé dans ces deux contextes historiques, permettant ainsi d’alimenter les analyses fondées sur une méthodologie qualitative variée (entretiens, observations, analyse documentaire). Pour mieux caractériser les opérations françaises et leurs évolutions, le choix a été fait de les mettre en perspective avec les exemples du Danemark et du Canton de Genève. S’inscrivant dans une sociologie de la ville, avec une orientation théorique et méthodologique inspirée par l’interactionnisme sans pour autant s’y enfermer, la thèse propose une analyse historique et thématique de la genèse de la construction allant des implications historiques du vivre ensemble et de la conception du commun, à la construction associative à travers les décennies. Le détour génésiaque s’offre ainsi comme un préalable indispensable pour comprendre les mécanismes d’action et leurs effets sur les acteurs politiques et professionnels dont les pratiques et les usages sont ancrés dans un monde où l’habitant reste souvent une figure mineure de la participation. C’est l’habitant-acteur qui fait l’objet du dernier axe de ce travail, dans la dimension individuelle, mais également collective : d’une part pour saisir les motifs d’implication dans ces projets alternatifs de long-terme, d’autre part, pour mettre en lumière les modifications induites dans la vision et les pratiques habitantes.
Mots clés
Logement coopératif, politique du logement, participation sociale
Principales conclusions
La thèse avait l'ambition d'aborder l'institutionnalisation de l'habitat participatif par le prisme de la genèse afin de mieux cerner les effets de ce phénomène sur les acteurs investis dans cette sphère. Après être revenu sur les modèles et les sources d'inspiration des opérations d'habitat participatif (tels que le Castorat ou les coopératives HLM), nous avons montré la synergie politique et associative dans le développement de ce modèle d'habitat, notamment au niveau local avec, à la fois une structuration (voire une professionnalisation) du mouvement associatif pour devenir un interlocuteur crédible des collectivités, et une ouverture croissante des élus locaux à cet habitat qui permet de répondre à des enjeux de politiques publiques et de marketing territorial. Cette conclusion est corrélée par les apports des exemples européens mobilisés.
Cette dynamique crée de l'intérêt chez les professionnels de l'habitat (bailleurs sociaux, architectes, AMO), lesquels adaptent leurs méthodes de travail pour intégrer l'habitant aux processus de décision dans le montage du projet. Néanmoins, nous avons montré que l'intégration des habitants (particulièrement dans les opérations faisant intervenir un bailleur social dans l'opération) aboutit à une adaptation, parfois minime, du cadre de décision existant et non une réinvention de ce dernier. Cet investissement des habitants reste motivé par des ambitions personnelles et collectives et provoque une montée en compétences de l'ensemble des membres, soutenue par des leaders thématiques souvent présents à l'intérieur du groupe, parfois appuyée par l'intervention d'un AMO.
Articles/WP liés à la thèse
Jeoffrey Magnier, « L’habitat participatif et l’impératif écologique : une utopie réaliste ? », Sciences de la société, 98 | 2016, 78-93.
Auteur/autrice
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Jean Bosvieux, statisticien-économiste de formation, a été de 1997 à 2014 directeur des études à l’Agence nationale pour l’information sur l’habitat (ANIL), puis de 2015 à 2019 directeur des études économiques à la FNAIM. Ses différentes fonctions l’ont amené à s’intéresser à des questions très diverses ayant trait à l’économie du logement, notamment au fonctionnement des marchés du logement et à l’impact des politiques publiques. Il a publié en 2016 "Logement : sortir de la jungle fiscale" chez Economica.
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