Le PLH, outil de gouvernance et de mise en oeuvre des politiques locales de l’habitat : état des lieux et perspectives

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En dépit de son important déploiement quantitatif, de la place que lui accorde l’Etat dans la mise en œuvre de ses politiques, ou de sa banalisation dans le dialogue entre acteurs locaux du logement, le Programme local de l’habitat fait l’objet aujourd’hui encore de nombreuses critiques. Faiblesse stratégique, incapacité à porter efficacement les politiques du logement ou encore déficit d’articulation avec les documents d’urbanisme, les points de vue exprimés sur le document font souvent référence à des situations particulières sans pour autant s’appuyer sur une analyse réellement transversale.
Etablie à la demande de l’Assemblée des Communautés de France, notre étude[1] prétend apprécier concrètement, et le plus objectivement possible, le rôle joué par le document dans la gouvernance actuelle des politiques de l’habitat, mesurer ses apports et ses limites, et formuler une série de recommandations. 

Un cadre national, des exercices locaux

Fin 2014, 646 communautés ou communes se sont dotées d’un PLH exécutoire ou engagé, dépassant largement le nombre de territoires tenus à une obligation réglementaire[2]. Au total, près de 70% de la population nationale est aujourd’hui concernée par un tel document.
D’abord imaginé pour orienter les aides à la pierre de l’Etat, le programme local de l’habitat est un instrument assumant au moins deux fonctions : il formalise l’implication des collectivités en matière d’habitat, et est le réceptacle du dialogue entre les acteurs sur cette question, au premier rang desquels les communautés et l’Etat. Les attendus exprimés par le code de la construction et de l’habitation (CCH) vis-à-vis du PLH reflètent les priorités fixées au niveau national par ce dernier, qui en complète régulièrement le contenu et la portée. Les propos tenus en mars 2016 sur la question foncière par Emmanuelle Cosse, Ministre du logement, l’illustrent.
Le contenu des documents analysés dans le cadre de cette étude[3] montre l’importance de la mise en tension entre ces préoccupations nationales, dont la déclinaison territoriale est opérée de manière plutôt homogène par les services déconcentrés de l’Etat, et des réalités locales bien plus diversifiées :

  • Les programmes locaux prennent appui sur des méthodologies largement diffusées, éprouvées, mais mobilisées avec plus ou moins de distance critique (modèle d’estimation des besoins en logement, modalités d’énonciation du corpus d’orientations stratégiques, format des fiches-action, …) ;
  • Ils expriment des préoccupations communes et partagées sur bon nombre de territoires (la recherche d’un meilleur équilibre social et territorial, le développement de stratégies de resserrement urbain et de régularisation de la consommation foncière,…) avec un « socle commun » de champs d’intervention jugés incontournables mais dont le contenu est plus variable : la programmation de logements, principalement locative sociale, la stratégie foncière, la précarité énergétique, l’accession sociale à la propriété…

Au-delà de ces similitudes, la portée stratégique et opérationnelle du PLH varie sensiblement d’un territoire à l’autre, au regard de trois grandes familles de facteurs : l’expérience du travail communautaire et la maturité de la coopération avec les acteurs de l’habitat ; la consistance urbaine et les caractéristiques du marché immobilier ; les compétences et champs d’intervention des communautés.
Les résultats de l’étude confirment des variations importantes dans les préoccupations traitées par le PLH au regard du profil de la communauté et des situations auxquelles elle est confrontée :

  • Pour celles composées de communes rurales, une place centrale est accordée à l’articulation de la politique de l’habitat avec les autres politiques communautaires et notamment celles en faveur du développement économique ;
  • Celles situées en espace périurbain manifestent un intérêt plus marqué pour un rééquilibrage de l’offre de logement ;
  • Les communautés plus urbaines accordent une priorité à la qualité des constructions neuves, ainsi qu’à la gestion des attributions de logements sociaux et du peuplement ;
  • Celles situées dans les espaces contraints (espaces littoraux, de montagne) ou en marché tendu se mobilisent, pour les plus avancées, autour d’enjeux plus prononcés en matière de maîtrise des marchés immobiliers.

Des nuances importantes apparaissent également selon l’ancienneté de la démarche : au fur et à mesure des générations de PLH, les communautés parviennent à s’émanciper du cadre réglementaire pour faire du document l’expression d’une plus claire stratégie locale :

  • Les « premiers » PLH se réfèrent plus directement aux attendus du CCH dans leur exhaustivité tout en manifestant une sensibilité forte à l’accompagnement des dynamiques démographiques et au rééquilibrage de l’offre de logement ;
  • Les PLH suivants investissent davantage la régulation de la production de logements, le développement de l’attractivité résidentielle ou les politiques sociales de l’habitat.

 Le PLH révélateur et instigateur d’une certaine gouvernance locale

Piloté par les communautés, le PLH est un exercice partenarial par nature. Il est le révélateur et le catalyseur d’une gouvernance locale où diverses influences sont à l’œuvre : communes, opérateurs immobiliers, acteurs économiques, habitants, sans oublier l’Etat, participent et contribuent à des niveaux très inégaux à la définition et à la mise en œuvre du document.

  • Le dialogue entre communauté et communes est très inégal. Le PLH est approprié de manière très variable, entre un document non prescriptif éclairant plus ou moins directement une action publique de ressort majoritairement communal, et l’instrument d’orientations de politiques de plus en plus intégrées au niveau communautaire.
  • Le rapport de négociation entre collectivités et les services locaux de l’Etat est plus ou moins apaisé. Ces derniers sont perçus comme légitimes mais trop souvent détachés de certaines réalités locales. Si ce rôle de garant des exigences réglementaires est reconnu comme pertinent et effectif, une contribution insuffisamment territorialisée ou trop statique est souvent regrettée par des communautés soucieuses de faire davantage reconnaître leurs spécificités. A l’heure où les politiques publiques en matière d’habitat sont de plus en plus intégrées au niveau local, des communautés regrettent l’approche trop « descendante » de certains services de l’Etat.
  • Les organismes HLM sont des partenaires centraux, mais leur association reste limitée.  Les organismes sont associés à l’élaboration de plus de 95% des PLH[4], ce qui illustre la part encore prépondérante accordée au parc locatif social dans les PLH. Leur mobilisation est néanmoins souvent restreinte à la phase de diagnostic. La perception du PLH par les organismes Hlm illustre cette association partielle : considéré comme une véritable feuille de route quand il a été élaboré en coproduction avec les organismes ou lorsque leur gouvernance les rattache de fait à la politique locale, il est dans d’autres cas jugé trop théorique et éloigné de leurs préoccupations opérationnelles.
  • Les acteurs issus de la société civile (autres professionnels de l’immobilier, opérateurs fonciers ou du parc privé, associations, acteurs économiques, …) sont encore assez peu associés, tandis que la population l’est sous des formes encore marginales et expérimentales.

Ces constats s’établissent dans le contexte plus général de dynamiques collectives qui se construisent progressivement et sont tributaires de la qualité du partenariat préexistant, mais aussi de la capacité même de la communauté à assumer un leadership et à travailler en transversalité.
Deux points principaux sont à noter à ce titre :

  • Le portage politique est un facteur essentiel de mobilisation partenariale. Il est généralement assuré par le président de la communauté ou un vice-président en charge de compétences de plus en plus larges dont les sensibilités et le territoire d’ancrage impactent les orientations données à l’exercice (champs investis, rapport de négociation avec les communes…). Pour 75% des territoires enquêtés il s’agit d’un vice-président, la mobilisation directe du président étant plus fréquente lors des premiers programmes (39% des PLH de 1ère génération[5]) ;
  • L’ingénierie technique est souvent adossée à une externalisation totale ou partielle de compétences : 88% des communautés font le choix de se doter d’une expertise extérieure dans un contexte plus global de moyens internes resserrés. Au-delà de la phase d’élaboration, seulement 35% des communautés enquêtées déclarent par ailleurs disposer de moyens humains suffisants pour la mise en œuvre du PLH.

Les méthodologies développées dans les différentes phases du PLH et par conséquent leur contenu accordent une place prépondérante à l’articulation entre échelles intercommunale et communale. L’échelle infra-communale tend néanmoins à se développer, par la mobilisation de données plus fines[6] en phase de diagnostic et pour le fléchage de la production de logement à un niveau opérationnel. Dans certains cas, une attention particulière est portée à des échelons intermédiaires, cette disposition étant prévue par le législateur (Métropole européenne de Lille).
Les travaux d’investigation conduits mettent en évidence plusieurs tendances transversales :

  • Le diagnostic constitue pour beaucoup de communautés un premier apport dans la connaissance des marchés et dans l’estimation des besoins en logement. C’est souvent une séquence clé dans le gain de légitimité de ces collectivités. Pour d’autres territoires, il s’agit à l’inverse d’approfondir une réflexion sur des politiques locales engagées au long cours, que le diagnostic vient éclairer ponctuellement (Rennes Métropole). Il est conduit dans un cadre partenarial plutôt large.

C’est un exercice réalisé de manière plutôt homogène, au regard des champs d’investigation (avec un trinôme récurrent associant caractéristiques socio-démographiques, parc de logements et construction neuve), des sources statistiques[7], ou encore des modes de recueil et de restitution de ces données.

  • La phase d’élaboration d’orientations stratégiques est appréhendée comme la plus sensible par une majorité de territoires interrogés. Pour 50% de ces acteurs, l’exercice de définition des politiques communautaires est le point le plus délicat dans l’élaboration des PLH. C’est en effet une étape qui se concentre souvent sur le choix d’un niveau et d’un rythme de construction, thématique particulièrement sensible aux yeux des élus. Cette étape est marquée par une approche plutôt quantitative avec un recours central et très standardisé à la technique du « point mort » et des scénarios de développement. Elle est menée dans un cadre partenarial plus restreint que celle de diagnostic.
  • Les programmes d’action sont construits selon une approche plus particulièrement approche itérative avec les communes, dans une logique de proximité et d’écoute. Les autres partenaires sont moins associés à ce stade. Ces programmes sont établis dans une perspective pré-opérationnelle (une large part des actions relevant de l’ingénierie) avec une définition plutôt faible des moyens, notamment financiers, alloués.

Limites et apports du PLH : sortir des idées reçues

Le PLH fait donc l’objet de nombreuses critiques : souffrant d’une faiblesse à incarner une réelle ambition stratégique, incapable de porter efficacement et de façon opérationnelle les politiques du logement, il manquerait également d’articulation avec les autres politiques sectorielles, raison pour laquelle les PLUI-H par exemple seraient plus vertueux.
Il nous est apparu ainsi incontournable de mobiliser le matériau constitué au travers de cette étude pour réinterroger les critiques usuelles formulées à l’encontre du document et en mesurer la réalité locale.

La question de la portée stratégique

Quelle capacité à énoncer un cap stratégique ? A intégrer les politiques publiques ?

Accrochés à des périmètres institutionnels qui ne reflètent pas toujours les réalités immobilière, sociale ou économique des territoires, certains PLH peuvent rencontrer des difficultés « originelles » à mobiliser des leviers à la bonne échelle ou à articuler efficacement politiques résidentielles et politiques connexes. C’est le cas notamment de l’ancienne carte administrative de l’Ile-de-France ou de territoires dont les dynamiques de périurbanisation dépassent le périmètre de la communauté. La stratégie proposée pourra alors rencontrer de réelles difficultés à avoir « prise » sur les réalités locales et les dynamiques à l’œuvre. Dans les territoires où un Schéma de Cohérence Territoriale est en place et est bien approprié, cette articulation entre les différentes politiques sectorielles peut trouver son principal terrain d’exercice à cette échelle, conduisant les acteurs à recentrer les travaux du PLH sur la « seule » dimension résidentielle. Au-delà de cette situation plutôt vertueuse, un certain nombre des documents analysés présentent une faiblesse d’articulation avec des questions pourtant au cœur des préoccupations des élus, à l’instar des besoins en équipement ou de l’attractivité économique, aux sujets desquels le PLH se cantonne souvent à un apport en diagnostic, impliquant une approche parfois théorique des besoins et de la capacité d’accueil du territoire. Ce constat est toutefois loin d’être universel, avec une part significative de PLH analysés interrogeant de manière fine l’interface entre les fonctions résidentielles, le développement économique et les besoins en équipements (Pays d’Aix, agglomération du Cambrésis…).
Du fait d’un cadre législatif très prescriptif dans l’énoncé des contenus attendus, certains PLH peuvent en outre peiner à hiérarchiser les champs d’action publique et mal refléter certaines préoccupations locales. C’est le cas par exemple de la transition énergétique qui est exprimée comme un enjeu local de plus en plus prégnant, sans que les PLH ne l’abordent de façon très opérationnelle. Certaines collectivités en font toutefois un fil rouge de leur stratégie (le Grand Nancy au travers de son PLHD (durable) ou de Dieppe maritime avec un PLH « AEU »[8]).
Force est de constater que le PLH reste dans encore de nombreux cas appréhendé comme un outil de contrôle par l’Etat de la « bonne » prise en compte de préoccupations et directives nationales, dans le cadre d’un CCH pointant de manière exhaustive l’ensemble des champs d’intervention publique, et donnant la primeur à la production, donc à une approche essentiellement quantitative et de développement des besoins en logement. En cela le PLH s’apparente parfois davantage à un outil de programmation d’actions de même importance apparente, qu’à un instrument favorisant l’énoncé d’une stratégie politique territorialisée et hiérarchisée. De plus en plus de communautés expriment toutefois la volonté de prendre une certaine distance vis-à-vis d’un cadre réglementaire trop exhaustif et prescriptif et assument un document qui cible et hiérarchise les objectifs d’action publique, et met de côté des domaines d’intervention jugés peu prioritaires (agglomération de Nevers, Evry Centre Essonne…)

Quelle capacité à infléchir les tendances à l’œuvre ?

Certains PLH semblent en outre rencontrer des difficultés à réellement infléchir les politiques publiques et plus largement les dynamiques du territoire (tendances démographiques, marchés, consommation foncière…). Bon nombre de PLH analysés abordent ainsi les politiques d’initiative communale sous un angle uniquement factuel (projets de rénovation urbaine, de traitement des quartiers anciens…) sans tenter d’en accompagner les effets et encore moins d’en infléchir les orientations (effets des démolitions sur la capacité d’accueil du territoire, jeux concurrentiels entre plusieurs opérations d’aménagement concomitantes…). En explorant très peu l’horizon dépassant le court/moyen terme (les 6 années « réglementaires » du programme d’action), l’exercice peut en outre rencontrer de réelles difficultés à aller au-delà des « coups partis » et à peser réellement sur les projets. Des collectivités ont toutefois ouvert la voie d’une approche plus prospective de leur action, inscrite dans le long terme (Rennes métropole, Nantes métropole).

La question du caractère opérationnel des PLH

Quelle capacité à traiter les potentiels et les dysfonctionnements repérés ? Quelle portée des actions proposées ?

L’alignement stratégique entre diagnostic, orientations et programme d’action est une étape délicate dans la conception et la formalisation du PLH. En particulier, la primeur accordée au développement démographique des territoires peut induire un découplage entre les éléments mis en évidence dans le diagnostic (perte de population, non atteinte des objectifs de construction du PLH précédent…) et les objectifs affichés (poursuite d’une production importante), découplage observé dans un nombre significatif de documents analysés. Le PLH de Nevers fait, à l’inverse de ces tendances, le choix d’assumer une situation de décroissance et affiche comme objectif prioritaire le renouvellement du parc, via la démolition des logements vétustes ou obsolètes et une limitation de la production.
En dehors de la production de logements, le programme d’actions reste souvent ciblé sur les mesures relevant des strictes compétences communautaires. Lorsque celles-ci sont limitées d’un point de vue opérationnel, le programme reste restreint à des mesures relevant de l’ingénierie. Ce constat est d’autant plus marqué dans les territoires ayant mobilisé des moyens financiers limités pour la mise en œuvre du programme.

Les principaux champs dans lesquels les PLH restent particulièrement peu offensifs concernent :

  • les politiques d’attribution des logements locatifs sociaux : la question n’est généralement pas abordée. Très peu énoncent des enjeux en matière de rapprochement entre l’offre et la demande en logement social ou d’équilibres sociaux à l’heure où le législateur prévoit pourtant une forte montée en compétence des communautés sur le sujet ;
  • la prise en compte des publics spécifiques : ce volet fait l’objet d’un traitement systématique (il est prévu dans le CCH et les services de l’Etat y sont attentifs) mais son contenu est souvent très faible, ne faisant souvent que reprendre le contenu de documents établis à un autre niveau (Plan départemental pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées, schéma départemental d’accueil des gens du voyage) ;
  • l’action foncière : les objectifs sont définis à l’échelon communautaire, mais les modalités de mise en œuvre restent souvent communales et adossées à une connaissance plutôt faible des marchés fonciers ;
  • la prise en compte du mal-logement : la majorité des PLH reste focalisée sur des dispositifs d’intervention incitatifs dans le parc ancien dégradé plutôt que coercitifs et prend encore peu en charge les situations les plus lourdes  ;
  • La transition énergétique/le développement durable : la question est souvent absente ou présentée de manière théorique. Des programmes plus ouverts à la question se limitent souvent là encore à une référence ou à la transposition directe des contenus de documents plus spécifiques (Plan Climat ou Agenda 21).

Ces constats méritent là encore d’être nuancés : le programme d’action constitue souvent une première étape dans le déploiement de moyens adaptés aux besoins du territoire et permet d’identifier les sujets appelant la mobilisation de ressources spécifiques traitées parfois dans une temporalité plus longue. A titre d’exemple, le PLH de la communauté de communes Val de Drôme propose une analyse foncière approfondie sur les besoins et gisements fonciers, afin de rendre son PLH plus opérationnel dans un second temps. Certains territoires prescrivent des actions précises en matière d’action sur le parc privé dégradé, à l’instar d’Evry Centre-Essonne. De nombreuses intercommunalités font plus globalement le choix d’afficher des engagements opérationnels très précis et d’annexer au PLH, par exemple, un règlement financier pour en faciliter la mise en œuvre (Métropole Rouen Normandie, Caen la Mer, communauté de communes de Seignaux).

Quelle appropriation locale ?

Cette limite dans la portée opérationnelle du programme d’action conduit certains élus à s’intéresser assez peu à ce volet du PLH, ce qui en limite d’autant plus la portée. Elle tend également à en désintéresser les opérateurs immobiliers qui l’appréhendent encore peu comme un cadre d’action, d’autant plus lorsqu’ils ont été peu associés à la démarche. Cette situation peut avoir des effets en chaîne sur la gouvernance et la légitimité de la communauté : en ne l’affirmant pas comme un interlocuteur « qui compte », le programme la marginalise dans le développement quotidien du territoire.
Lorsqu’il est décliné en conventions, le programme devient en revanche une véritable feuille de route, à l’instar de celui de la Métropole européenne de Lille ou de Rennes Métropole qui ont adossé au PLH un certain nombre de conventions avec les organismes HLM et les communes.
La non-opposabilité du PLH est l’une des critiques ayant conduit le législateur à l’intégrer aux PLU portés par les communautés volontaires. Si la traduction du PLH dans les PLU peut accorder une large part à l’interprétation (avec un réflexe de mise en cohérence plus ou moins bien intégré au moment de la révision des documents d’urbanisme), la pratique évolue pourtant vers une spécification de plus en plus explicite des impacts du PLH sur ces documents : fléchage des secteurs de mixité ; emplacements réservés ; obligations en termes de densités minimales ; repérage dans les fiches-action des impacts sur les documents d’urbanisme…

Quel avenir pour le PLH ?

Si l’analyse montre que le PLH reste perfectible dans bon nombre de situations, le chemin parcouru par les collectivités disposant d’une certaine avance méthodologique montre à l’inverse une réelle tendance à la « bonification » du document et à son caractère au final assez incontournable, y compris aux yeux des collectivités ayant expérimenté le PLUI-H.
Les limites et points de vigilance évoqués ici concernent ainsi plutôt les premières générations de PLH, celles-ci étant souvent conduites dans une démarche marquée par un caractère à la fois « novice » qui conduit certains techniciens à appliquer le CCH en « bon élève », « sous contrainte », les élus ayant le sentiment de devoir rendre des comptes à l’Etat pouvant être tentés de limiter la portée du document, et « consensuel » au risque parfois de faire du PLH le reflet de l’intérêt prépondérant des communes membres et le recueil de projets conçus à cet échelon. Cette première étape s’avère néanmoins souvent indispensable pour instaurer un climat de confiance entre les communes, l’intercommunalité et leurs partenaires. Elle permet une prise de conscience de l’apport d’une démarche décloisonnée portée au niveau intercommunal, faisant du PLH un outil propice à l’expression d’une stratégie et d’un cadre d’action de plus en plus intercommunal. Il participe en cela à la reconnaissance progressive du fait communautaire et met les communautés en situation de démontrer progressivement leur « valeur ajoutée » sur un sujet d’une grande complexité.
Fort de ces constats, l’étude pointe un certain nombre de recommandations. Celles-ci s’attachent principalement aux conditions de l’élaboration du PLH, pour en conforter la portée tant stratégique qu’opérationnelle.


[1] Le Doeuff AK, Baudet-Collinet D, Belval-Lavillonnière E, Le PLH, outil de gouvernance et de mise en œuvre des politiques locales de l’habitat : état des lieux et perspectives.

[2] Près de 50% des PLH échappent à toute obligation réglementaire

[3] Exploitation des données de la DGALN ; Enquête électronique réalisée auprès des communautés de plus de 20 000 habitants ; Entretiens téléphoniques approfondis auprès des techniciens en charge des PLH de 26 communautés ; Réalisation de 11 monographies

[4] Enquête électronique réalisée auprès des communautés de plus de 20 000 habitants

[5] C’est-à-dire le premier PLH élaboré par la communauté.

[6] Données carroyées, IRIS, Majic…

[7] INSEE, Filocom et le Parc Privé Potentiellement Indigne (PPPI), Sit@del, Perval/BIEN, OPS et RPLS ; et de manière plus variable, des informations plus ciblées sur la vacance ou les copropriétés, sur la consommation foncière, la qualité énergétique du parc…

[8] Approche Environnementale de l’Urbanisme

Auteur/autrice

  • Anne-Katrin Le Doeuff, Delphine Baudet-Collinet, Emilie Belval-Lavillonnière

    Anne-Katrin Le Doeuff est une consultante spécialisée dans le champ des politiques de l’habitat et du renouvellement urbain. Elle a participé à la création d'Espacité, dont elle est aujourd’hui la Directrice générale déléguée. Elle est particulièrement engagée dans la résolution de politiques résidentielles complexes (rénovation urbaine, politiques d’attribution et de peuplement, modes alternatifs de production de de logements…) et sur les études de portée nationale (études prospectives, évaluations...). Delphine Baudet-Collinet est une consultante spécialisée dans le champ des politiques sociales et territoriales de l’habitat. Elle intervient au sein du cabinet Espacité en tant que directrice opérationnelle. Elle pilote auprès des collectivités des missions de définition de stratégies habitat (Programmes locaux de l'habitat, évaluations, observatoires) et de mise en œuvre de la réforme des attributions de logements sociaux (installation de CIL, plans partenariaux...). Emilie Belval-Lavillonnière est une consultante spécialisée dans le champ des politiques de l'habitat et du renouvellement urbain. Elle intervient au sein du cabinet Espacité en tant que directrice opérationnelle. Elle pilote en particulier les missions relatives au renouvellement urbain et projets urbains, à la prospective territoriale, et à l’observation-évaluation des politiques publiques.

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