Prévenir une nouvelle crise des subprime, ou l’arroseur non arrosé

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Les crises économiques n’ont pas attendu la mondialisation pour se propager au-delà des pays où elles ont pris naissance. La libéralisation des échanges financiers et la financiarisation d’une part croissante des activités économiques interdisent à un pays déterminé de se mettre à l’abri de la contagion des désordres de ses partenaires. C’est parce que les crises financières ne s’arrêtent pas aux frontières que les 28 pays membres du Comité de Bâle ont choisi d’adopter des règles communes.

Des réformes nées de la crise des subprime

La crise financière mondiale trouve son origine dans les dérives de la pratique américaine en matière de crédit dont on ne rappellera ici que quelques aspects. Soucieux de répondre à la croissance de la demande de crédit formulée par les générations postérieures au baby-boom, les établissements de crédit se sont affranchies des contraintes qui limitaient leur production en fonction du niveau de leurs fonds propres. Ils l’ont fait en exploitant les possibilités de transfert du risque depuis le prêteur vers les investisseurs en transformant les créances en titres hypothécaires (mortgage backed securities). En outre, ils n’étaient pas tenus par des règles de protection du consommateur qui les auraient contraints à s’assurer de la possibilité des emprunteurs de faire face à leurs échéances de remboursement. Cela leur a permis d’élargir leurs activités en se dispensant du contrôle de la solvabilité des emprunteurs et grâce à des artifices qualifiés de « novateurs », comme les teaser loans qui sont des crédits assortis de taux d’intérêt extrêmement faibles pendant une brève période initiale.
La sophistication des techniques de titrisation et la confiance excessive accordée aux agences de notation ont mis les investisseurs dans l’incapacité de juger de la qualité des créances et de la valeur des logements qui leurs servaient de garantie. Cela n’a pas freiné l’enthousiasme des détenteurs de capitaux à la recherche de hauts rendements, dans un environnement de surliquidité mondiale. Le pari d’une poursuite de la hausse des prix semblait offrir une garantie suffisante aux investisseurs en cas de défaillance des emprunteurs. L’externalisation des créances était censée mettre les établissements de crédit à l’abri des conséquences de ces défaillances. La vérité, c’est qu’aucun pare-feu ne peut protéger efficacement un système financier de la défaillance des emprunteurs si celle-ci devient massive. Quant au risque social qu’un tel pari faisait supporter aux ménages, il n’a pas vraiment été pris en compte ou il a été jugé comme la contrepartie de la possibilité offerte au plus grand nombre de devenir propriétaire.
Ce sont de telles pratiques que la loi Dodd-Frank et les préconisations du comité de Bâle ont pour objet de proscrire, afin d’écarter le risque d’une nouvelle crise financière. Un nouveau cadre réglementaire a donc été défini qui traite des règles prudentielles et du fonctionnement du marché des capitaux.  Ce cadre, qui devrait transformer assez profondément les modalités de fonctionnement de la filière de crédit aux États-Unis, doit également s’imposer, sous des formes diverses, à l’ensemble des pays développés à économie de marché. Des pays comme le Canada, la France ou l’Allemagne sont donc également concernés, bien que leur système de crédit n’ait pas connu les mêmes dérives et que chacun d’entre eux s’inscrive dans un marché du logement dont la logique est spécifique.  Au demeurant, s’ils ont subi les conséquences économiques de la crise, aucun de ces pays n’a connu l’explosion des impayés d’accession observée aux États-Unis au Royaume Uni ou en Espagne.

L’adoption de la loi Dodd-Frank

 Les Etats-Unis étaient à l’épicentre de la crise financière internationale de 2007-08. Il n’est donc pas surprenant que la refonte du cadre réglementaire du système financier américain ait constitué une priorité pour l’Administration Obama au début de son mandat comme pour les législateurs du Congrès Américain – tant à la Chambre des représentants qu’au Sénat. Malgré les objections de nombre de parlementaires, surtout parmi les Républicains, et de lobbyistes de Wall Street, la loi Dodd-Frank a finalement reçu l’approbation des deux chambres du Congrès Américain et du Président Obama en 2010. En parallèle, la Federal Reserve a fait part de son adhésion aux dispositifs de l’accord de Bâle en 2011. Les contraintes additionnelles qui en découlent devront s’imposer aux banques américaines. Le champ d’application des dispositions de la Loi Dodd-Frank est plus large que celui de l’accord de Bâle. Celles-ci concernent non seulement les activités bancaires, mais aussi le marché des capitaux, et elles s’imposent à la fois aux établissements financiers régis par la Federal Reserve et à tous les autres acteurs du marché des capitaux, notamment les agences de notation et les fonds d’investissements.

 Les dispositions de la loi Dodd-Frank

Adoptée en juillet 2010, la loi Dodd-Frank introduit de nouvelles dispositions de protection des consommateurs. Plusieurs d’entre elles portent sur la forme de l’offre de crédit hypothécaire, l’instruction de la demande de crédit, par exemple le niveau maximum d’endettement du ménage, etc…), sa documentation, ainsi que sur les caractéristiques du crédit lui-même, comme le taux et les frais annexes. Le respect de ces normes est obligatoire pour que les crédits puissent ensuite être cédés aux agences de refinancement de crédit hypothécaire (notamment Fannie Mae et Freddie Mac) afin d’être transformés et vendus sous la forme de titres financiers, les Mortgage Backed Securities (MBS). Les crédits qui répondent à ces normes entrent dans la catégorie des qualified mortgages (QM). La loi impose aussi à l’émetteur de titres dérivés de crédits[1]de conserver 5% de la valeur de ces titres à son bilan. Toutefois, la loi en dispense les établissements qui émettent des MBS garantis par des crédits hypothécaires de plus haute qualité, les Qualified Residential Mortgages (QRM).

La conformité entre la loi Dodd-Frank et les préconisations du comité de Bâle

Dans une évaluation publiée en décembre 2014, le Comité de Bâle a confirmé que la réglementation américaine des établissements financiers était dans l’ensemble conforme aux normes de Bâle III. L’analyse signalait certaines lacunes techniques mais observait aussi que la capitalisation des banques américaines était supérieure aux normes minimales de Bâle, sans doute grâce à la titrisation qui, dans le domaine du crédit hypothécaire, permet aux banques américaines de développer leur production de nouveaux crédits, sans exigence supplémentaire de capitalisation. 

Une application à reculons

Dans un premier temps, dès 2014, les agences mandatées pour appliquer Dodd-Frank se sont accordées pour éliminer la distinction entre les crédits de qualité supérieure, les QRM et les autres crédits jugés de qualité suffisante pour la titrisation, les QM. L’obligation pour les établissements de conserver 5% de l’encours dans leur bilan pour disposer de réserves suffisantes a ainsi disparu de facto.
En parallèle, dès 2009, l’Administration Obama avait proposé une refonte de l’architecture du marché du crédit hypothécaire américain, qui conduisait notamment à redéfinir les rôles respectifs du gouvernement, des GSE[2] (Fannie Mae et Freddie Mac), et du marché privé. Les propositions de l’Administration ont été reprises par les législateurs au Congrès qui, à partir de 2013, ont également proposé une réforme plus fondamentale avec la création de nouveaux mécanismes de titrisation des crédits hypothécaires, mais ces réformes n’ont pas été conduites jusqu’à leur terme.

Le projet PATH (Protecting American Taxpayers and Homeowners Act)

Dans le cadre législatif, on doit surtout retenir les travaux parlementaires sur le projet de loi PATH (Protecting American Taxpayers and Homeowners Act – ou Loi protégeant les contribuables et propriétaires américains), parce qu’elle a été proposée au Congrès Américain en 2013 par un comité de la Chambre des Représentants dirigé par un représentant du Parti Républicain, et soutenue par le Représentant Hensarling (du Texas), présenté comme proche du futur Président Trump, et par celui qui allait devenir le Secrétaire au Trésor, M. Steven Mnuchin. Toutefois, ce projet de loi n’a pas été soumis à l’approbation de l’assemblée entière de la Chambre des représentants, ni étudié par le Sénat. Parmi les éléments les plus importants du projet de loi PATH figurait la suppression progressive des agences Fannie Mae et Freddie Mac, l’absence affirmée de garantie par l’Etat des crédits titrisés et la prise en charge exclusive des risques par les investisseurs dans les titres MBS. Jusqu’alors la garantie de l’Etat était considérée comme implicite ; désormais l’absence de garantie deviendrait explicite. PATH confirme ainsi l’absence d’exigences de retenues de risques par les émetteurs de titres MBS. Par ailleurs, le projet de loi propose aussi de réduire la protection accordée par la FHA (la « Federal Housing Administration »[3]) dans le cadre de son programme d’assurance insolvabilité, passant d’une couverture de 100% à 50% des pertes. Il propose enfin de reporter à plus tard la mise en œuvre de certaines exigences de Bâle III, notamment celles qui concernent les exigences en capital.

Le projet Financial Choice Act

Deux ans plus tard, à la fin de la session de 2016, le Représentant Hensarling est revenu à la charge, mais cette fois-ci dans le cadre d’un projet de loi intitulé the Financial Choice Act ou Choice Act, en proposant une série de modifications de la Loi Dodd-Frank. Parmi celles-ci, le droit pour les banques de choisir entre un contrôle prudentiel et réglementaire simple – éliminant les dispositifs pointus de Bâle en matière de capitalisation et de liquidité en contrepartie de l’application d’un « effet de levier de 10% » dans le calcul des fonds propres de la banque – et les contrôles prévus selon Bâle III. Le Choice Act ne comporte pas d’autres dispositifs spécifiques au fonctionnement du marché du crédit hypothécaire. Le projet de loi, recommandé par le comité régissant les « services financiers » (House Financial Services Committee) présidé par le Représentant Hensarling, meurt au feuilleton de la Chambre des représentants au moment où les Américains choisissent Donald Trump comme nouveau Président des Etats-Unis d’Amérique.
En résumé, près de neuf ans après une crise financière mondiale née aux Etats-Unis, c’est finalement une mise en œuvre « à reculons » de mesures pour assainir le marché hypothécaire américain dont nous sommes témoins. Même si, au départ, l’Administration Obama s’était engagée à mettre sur pied les mesures nécessaires pour éviter que le désastre de 2007-08 ne se reproduise, elle a finalement dû abdiquer face aux pressions des législateurs et lobbies, au motif que les réformes proposées augmenteraient le coût du crédit pour les consommateurs et seraient néfastes à l’innovation et aux opportunités d’affaires. Près de neuf ans après la crise, le renforcement du système financier américain, et notamment du marché du crédit hypothécaire, semble secondaire par rapport au soutien de la croissance économique et la satisfaction à court terme de demandeurs de crédit. À première vue, on semble s’éloigner des engagements et préoccupations qui ont motivé les réformes de Bâle III.

Epilogue : Trump annonce qu’il va renoncer à la loi Dodd Frank

On connaîtra probablement bientôt les intentions de la nouvelle administration Trump concernant la réglementation et l’architecture du marché du crédit hypothécaire. Toutefois, au moment où cet article est rédigé, il semblerait que l’Administration Trump soit en discussion avec le Représentant Hensarling (du Texas), président du comité sur les services financiers de la chambre des représentants (House Financial Services Committee) pour définir le programme de la nouvelle administration en matière de réformes du secteur financier, notamment les modifications à apporter à la Loi Dodd-Frank. Pendant sa campagne pour la présidence, M. Trump a indiqué sans équivoque qu’il procéderait à l’abrogation de cette loi, sans dire ce qu’il entendait par là, mais il a été muet concernant les mesures touchant le crédit hypothécaire. Compte tenu de l’influence du Représentant Hensarling, on peut présumer que plusieurs éléments du projet de loi PATH de 2013 feront à nouveau surface.
Toutefois, les médias ont fait état de ce que le Secrétaire au Trésor, Steven Mnuchin, serait sensible à l’effet que les mesures de la nouvelle administration Trump pourraient avoir sur les taux d’intérêt, notamment les taux des crédits hypothécaires, et qu’il serait ouvert à la recherche d’une solution qui, plutôt que de supprimer les agences Fannie Mae et Freddie Mac, les libérerait de la tutelle publique pour en faire de purs opérateurs privés de marché.

L’application des préconisations du Comité de Bâle sur le contrôle bancaire vient mettre en cause le système français.

Les préconisations du comité de Bâle[4]  sur le contrôle bancaire suscitent l’étonnement et l’inquiétude parmi les acteurs français du financement de l’habitat. Dans sa version Bâle IV, le comité a jugé nécessaire d’encourager la titrisation et a envisagé de pénaliser par les ratios de fonds propres les prêts à taux fixe au regard des prêts à taux variable. Il a également envisagé de suivre les approches américaines en pénalisant en fonds propres les prêts à LTV élevé[5]. En un mot, pour assurer la sécurité du système financier, il faudrait, selon le comité de Bâle, transférer les risques de l’établissement prêteur vers l’emprunteur et vers l’investisseur. Or c’était précisément ce qui prévalait en 2008 dans les pays où les accédants à la propriété ont été le plus durement frappés par la crise. Titrisation et taux variables permettent de faire porter le risque par les investisseurs et les emprunteurs et de mettre à l’abri celui qui a pris la décision d’accorder le prêt. C’est ce qui avait permis de consentir à des ménages modestes des prêts toxiques ou d’un montant tel que leur remboursement était conditionné par la survenance d’événements incertains : hausse du revenu de l’emprunteur, hausse du prix du logement ou même hausse des rendements locatifs pour les prêts aux investisseurs.  En France, les prêts à taux fixe représentaient, en 2016, 97 % de la production. Que se passerait-il dans le cas de hausse substantielle des taux, si les accédants qui s’endettent aujourd’hui à des taux fixes inférieurs à 3% le faisaient avec des taux variables ? Les établissements de crédit qui adossent actuellement ces taux fixes à un mélange de ressources tirées des dépôts, de la trésorerie de l’épargne logement et une part croissante d’obligations couvertes, prennent certainement un risque, mais on peut espérer qu’ils disposent de tous les outils de simulation pour en faire une estimation prudente, ce qui n’est pas le cas des emprunteurs (les prêts à taux variables sont associés à des taux de défaut plus élevés, au demeurant). Le résultat des stress tests publié en octobre 2014 donne à penser que cet espoir est fondé.  Plus récemment, le comité de Bâle a recommandé de durcir les règles concernant les ratios de fonds propres pour les opérations à faible taux d’apport personnel. La défaillance de l’emprunteur peut entraîner une perte pour le prêteur si la valeur vénale du bien est inférieure à la dette résiduelle. La vente ne suffit alors pas à éteindre la dette. Ce risque est évidemment d’autant plus grand que la part du financement à crédit dans l’opération est plus élevée, autrement dit que le taux d’apport personnel est plus faible. Or on sait que bon nombre d’accédants à la propriété français ne disposent que d’un faible apport personnel, ce qui jusqu’à présent ne les empêche pas de financer leurs projets. Les opérations financées sans aucun apport personnel ne sont d’ailleurs pas rares. La décision du prêteur se fonde en France sur une analyse rigoureuse de la solvabilité de l’emprunteur bien plus que sur l’évaluation de la valeur du bien financé, laquelle ne donne jamais lieu à une expertise formelle. Le prix de la transaction est censé fournir une appréhension suffisante de la valeur du gage. Il est vrai que la quasi-absence de sinistralité qui caractérise le modèle français a pour contrepartie un accès au crédit plus restrictif que dans d’autres pays. Mais ceci est compatible avec l’équilibre des statuts d’occupation. En effet, l’existence d’un parc locatif important, qu’il appartienne aux propriétaires privés ou aux bailleurs sociaux, fait que l’on n’est pas contraint d’accéder à la propriété pour se loger en France. Avant la crise, les autorités européennes voyaient dans les spécificités du système français une espèce de gallic oddity. L’accent mis sur la protection du consommateur, le plafonnement de l’indemnité de remboursement anticipé, l’existence d’un taux d’usure, l’absence de fichier positif, l’absence de certaines formes de crédit ou l’existence de multiples délais de réflexion, étaient considérées comme autant d’obstacles dressés devant la concurrence des établissements étrangers et de freins à la construction d’un marché hypothécaire européen intégré. C’était certainement vrai, mais les différents acteurs y trouvent leur compte[6]. Les emprunteurs français bénéficient, avec les allemands, des taux les plus bas d’Europe et d’une protection très forte. L’objectif n’est pas de prêter à tout prix et c’est une différence fondamentale avec les Etats-Unis, où le statut de locataire reste transitoire ou très fortement déprécié. D’une façon générale, l’impression prévaut que les préconisations du comité de Bâle se fondent sur une vision du marché du logement en décalage avec la réalité française. Or le modèle français a des caractéristiques bien particulières, difficilement conciliables avec l’application des préconisations du comité de Bâle. Ce sentiment est d’autant plus vif que les Etats-Unis semblent maintenant s’exonérer du respect des règles établies en fonction de leurs propres dérives. Les européens, pour lesquels les nouvelles contraintes de fonds propres seraient ruineuses, se lient les mains aux moments où les États-Unis semblent décidés à se libérer de toutes les contraintes.

Les changements nécessaires au Canada 

Les exigences de Bâle à l’égard de la gestion des liquidités et de l’adéquation entre l’usage et la source des fonds ne susciteront pas les mêmes effets au Canada qu’en France, puisqu’au départ les crédits à taux fixe n’étaient et continuent de n’être offerts que pour des périodes plus restreintes – 5 ans par exemple. Les banques et autres établissements de crédit financent ainsi leurs crédits hypothécaires grâce à des certificats de dépôts à termes de durée correspondante ou grâce à des opérations de titrisation.
Les risques découlant des variations dans les taux de crédit sont ainsi partagés entre les investisseurs ou épargnants, qui s’engagent à investir selon des termes et conditions fixes pour une durée donnée, et les emprunteurs, qui sont exposés à l’impact de la fluctuation des taux d’intérêt au moment où leur crédit hypothécaire doit être renégocié.
Concernant ce dernier élément de risque, suite à plusieurs vagues de mesures macro-prudentielles visant à renforcer les normes d’octroi de crédit hypothécaire, le gouvernement annonçait en octobre 2016 que les demandeurs de crédit hypothécaires doivent désormais démontrer leur capacité de rembourser leur crédit à un taux plus élevé – publié par la Banque du Canada – que celui offert au moment de la transaction. Cette mesure a eu pour effet d’exclure les demandeurs de crédit qui ne pouvaient satisfaire aux normes minimales du crédit hypothécaire que grâce aux taux record offerts depuis peu après la crise financière.

Conclusion 

Ainsi, à la suite de la crise des subprime, dont les Etats Unis portent la responsabilité, de nouvelles normes d’organisation de la filière de crédit ont été définies pour en tirer les conséquences. Celles-ci viendront peser sur les établissements de crédit, y compris ceux dont la pratique a permis à leurs clients de traverser la crise mondiale sans dommage. En Europe, la définition de ce nouveau cadre est entre les mains des experts du Comité de Bâle sur le contrôle bancaire[7] et échappe à l’examen des parlementaires, que ceux-ci siègent à Bruxelles ou dans les parlements nationaux. De leur côté, les autorités américaines semblent maintenant choisir, après avoir traîné les pieds, de se dispenser de l’application de ces règles pourtant définies à leur mesure. La façon dont cette question est traitée apporte de l’eau au moulin de ceux qui ne voient dans les règlements internationaux que le seul reflet des rapports de force.


[1] La Loi Dodd-Frank requiert que l’émetteur de titres dérivés de crédit – « Asset-Based Securities » – retienne 5% de la valeur de l’émission sous forme de capital, disponible dans l’éventualité d ‘impayés. Ceci est en réponse au principe voulant que « le prêteur y mette sa propre peau » (« skin in the game » en anglais) pour éviter les dérives de 2007 où les émetteurs se lavaient les mains de la qualité des crédits sous-jacents aux titres émis sur les marchés des capitaux. Ceci s’appliquait tant aux crédits hypothécaires qu’aux crédits-voiture par exemple. On verra dans le texte que, finalement, tant les QM que les QRM seront exemptés de cette exigence en capital.

[2] Government Sponsored Enterprises

[3] The Federal Housing Administration (FHA) est une agence publique qui assure les prêts hypothécaires des primo-accédants disposant d’un apport personnel faible. Son objectif est proche de celui de la SGFGAS en France.
Cf. https://politiquedulogement.com/dictionnaire-du-logement/g/garanties-demprunt/

[4] Le Comité de Bâle est chargé de renforcer la solidité du système financier mondial ainsi que l’efficacité du contrôle prudentiel et la coopération entre régulateurs bancaires.

[5] C’est-à-dire à faible taux d’apport personnel. Le LTV (loan to value ratio) est le rapport du montant du prêt au montant total de l’opération.

[6] Cf. C.Taffin et B. Vorms, »Elargir l’accès au crédit aux emprunteurs atypiques« , 2007.

[7] Le Comité se compose de représentants des banques centrales et des autorités prudentielles des principaux pays industrialisés
https://acpr.banque-france.fr/international/la-cooperation-au-niveau-international/les-instances-internationales/secteur-banque/le-comite-de-bale.html

 

Auteurs/autrices

  • André Asselin

    André Asselin, économiste de formation, est depuis fin 2011 consultant en matière de politiques et financement de l’habitat œuvrant à l’international. Il a été Directeur exécutif des opérations internationales et, auparavant, Directeur de la planification stratégique et des politiques Afrique et Asie de la Société Canadienne d’Hypothèques et de Logement (SCHL) – l’agence canadienne de l’habitat. Il a fourni des avis stratégiques et techniques dans plus de 15 pays d’Europe.

  • Bernard Vorms

    Economiste spécialisé dans le domaine du logement, IEP de Paris et DES d’économie politique. Il a dirigé l’ANIL/agence nationale pour l’information sur le logement et présidé la SGFGAS/société de gestion du fond de garantie de l’accession sociale jusqu’à la fin de l’année 2013. Il a présidé le Conseil national de la transaction et de la gestion immobilière de 2014 à 2019. Il a réalisé de nombreux rapports pour le gouvernement et publié des études mettant l’accent sur les comparaisons internationales.

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