Investissement immobilier

Réaliser un investissement, c’est acquérir un bien durable en vue de la production d’un bien ou d’un service.

L’acquisition d’un logement répond parfaitement à cette définition. En effet, le bien immobilier en général, et le logement en particulier, est le bien durable par excellence : en 2019, selon les données du recensement de la population, près de la moitié des logements dataient de plus de 50 ans et les trois quarts de plus de 25 ans.
Le bien logement produit un service de logement, dont le producteur est le propriétaire de ce logement et le consommateur l’occupant. Les rapports entre producteur et consommateur définissent les trois grandes filières de production du service de logement qui correspondent aux statuts d’occupation les plus répandus : propriétaires occupants, locataires et ménages logés gratuitement. Dans le cas d’un logement locatif, le locataire verse au bailleur un loyer qui représente le prix du service de logement. Dans les autres cas, il n’y a pas de flux financier entre le producteur et le consommateur : le service de logement correspond alors à un avantage en nature pour les ménages logés gratuitement, et à l’économie réalisée par rapport au loyer d’un logement similaire pour les propriétaires occupants. Quel que soit son statut d’occupation futur, l’acquisition d’un logement constitue donc, dans tous les cas, un investissement.
Selon cette définition, et conformément au principe de la comptabilité nationale qui veut que l’immobilier soit le seul domaine d’investissement des ménages (plus exactement, leur seule contribution à la formation brute de capital fixe), tout détenteur de logement, et notamment tout propriétaire occupant, est un investisseur immobilier. Dans le langage courant, ce terme est en général réservé aux personnes physiques ou morales qui acquièrent ou détiennent des biens immobiliers de rapport, c’est-à-dire destinés à la location.

Caractéristiques du bien immobilier

L’immobilier présente des caractéristiques qui expliquent sa spécificité par rapport aux autres types d’investissement. En premier lieu, l’importance de la localisation. Deux logements physiquement identiques diffèrent par leur localisation : ainsi, le prix des appartements d’un même immeuble varie en général en fonction de l’étage ; l’environnement fait également partie des caractéristiques liées au logement, il peut lui aussi influer fortement sur sa valeur. Comme il n’existe pas deux localisations strictement identiques, des biens immobiliers ne peuvent être exactement semblables : on dit que les actifs immobiliers sont hétérogènes.
En second lieu, l’investissement immobilier se caractérise par sa « taille » importante : ainsi, la valeur d’un logement représente en général plusieurs années de revenu du ménage qui l’occupe, et son financement implique, dans la plupart des cas, le recours à un crédit de longue durée. Par ailleurs, la difficulté de diviser physiquement un actif immobilier fait qu’il n’est guère possible d’investir de petites sommes dans l’immobilier : il existe, certes, des outils pour ce faire – c’est ce que l’on appelle la « pierre-papier » – mais leur utilisation reste marginale, du moins dans le domaine du logement.
Enfin, nous l’avons vu, les biens immobiliers sont des actifs dont la durabilité est particulièrement longue. Leur durée de vie est couramment de plusieurs décennies, elle dépasse parfois un siècle. Cette longévité implique la réalisation de travaux de maintenance et de modernisation : les dépenses correspondantes, en ce qu’elles permettent d’incorporer de la valeur dans les actifs en question – ou, ce qui revient au même, les empêchent de se dévaloriser – , constituent également des investissements immobiliers.

Les investisseurs et leurs motivations

Dans l’ensemble de l’investissement immobilier, le logement se caractérise par la place importante qu’occupent les ménages parmi les investisseurs. Selon le compte du logement, les ménages possédaient en 2019 82 % des résidences principales, contre 18 % pour les bailleurs sociaux et moins de 1 % pour les autres personnes morales.
En théorie, l’investisseur se préoccupe de la rentabilité de son investissement, laquelle est la résultante de deux éléments : le rendement locatif, c’est-à-dire les flux de revenus périodiques générés par l’exploitation du bien, et le rendement en capital, c’est-à-dire la plus ou moins-value réalisée en cas de revente du bien. En réalité, rares sont les investisseurs qui effectuent un tel calcul.
Dans le cas des propriétaires occupants, la rentabilité de l’investissement n’est pas, loin s’en faut, la motivation première. Le choix entre le statut de propriétaire et celui de locataire, thème récurrent d’articles journalistiques, n’obéit pas à un calcul économique. En effet, le désir d’être « chez soi », la satisfaction que procure le fait d’être propriétaire – et qui transparaît nettement à travers les enquêtes logement de l’INSEE – peuvent difficilement être traduits en points de rendement ; par ailleurs, dans certaines localisations, l’absence d’offre locative adaptée aux désirs du ménage peut restreindre le choix. Enfin, l’évaluation de la rentabilité suppose que l’on se projette dans un futur relativement éloigné : l’expérience montre que c’est rarement le cas parmi les candidats à l’accession à la propriété, la majorité d’entre eux n’envisageant même pas l’éventualité d’une revente.
La rationalité économique est, certes, plus présente lorsqu’un ménage achète un logement pour le louer. Toutefois, il peut arriver que d’autres motivations viennent interférer avec celle de la rentabilité, par exemple l’occupation personnelle du logement au terme d’une période de location, ou le logement d’un membre de la famille.
La rationalité des bailleurs sociaux obéit, quant à elle, à une autre logique que celle du profit. La décision d’investir est prise, dans le cadre général d’objectifs définis par les pouvoirs publics, en fonction d’un critère d’équilibre financier de l’opération, compte tenu des conditions de financement privilégiées de ce type d’investissement et des contraintes (plafonnement du loyer) qui s’y attachent. L’hypothèse d’une revente n’est pas prise en considération.
En définitive, seuls ceux que l’on appelle les « investisseurs institutionnels », c’est-à-dire les personnes morales autres que les bailleurs sociaux –compagnies d’assurances, sociétés foncières, SCPI, etc. – raisonnent en fonction du rendement. C’est d’ailleurs ce qui explique la faiblesse de leur intervention dans le domaine du logement, auquel elles préfèrent l’immobilier d’entreprise, moins réglementé et plus rémunérateur.

Les risques liés à l’investissement immobilier

Comme tout investissement, l’investissement immobilier est un pari sur l’avenir : il comporte donc des risques, au sein desquels on peut distinguer des risques de gestion et des risques financiers.
Les risques de gestion – si l’on élimine les risques de destruction ou de dégradation du bien, qui peuvent être couverts par des contrats d’assurance – sont liés à l’état du marché locatif. Faute d’une demande suffisante, l’investisseur peut subir des périodes de vacance ou être amené à accepter un loyer moins élevé que celui escompté. Ce type de risque ne concerne a priori que les investissements locatifs ; mais un accédant à la propriété peut également y être soumis, s’il est amené à déménager et à louer son logement.
En cas d’atonie du marché, la valeur du bien peut diminuer. Il y a alors risque de perte en capital en cas de revente du bien. Dans le cas d’un accédant à la propriété, il peut alors se faire que la valeur de revente soit inférieure au montant de la dette résiduelle au prêteur (le capital restant dû). Une telle situation (dite de « negative equity » par les anglo-saxons) peut être un obstacle à la mobilité résidentielle : au minimum, la revente entraîne la perte de l’apport personnel, au pire, si l’accédant ne peut rembourser le capital restant dû, elle est impossible. Le risque de negative equity est d’autant plus fort que le recours au crédit est plus important (que la quotité de l’emprunt est plus élevée) et que l’amortissement de l’emprunt est moins rapide.
Les risques financiers purs sont liés à la nature de l’emprunt : augmentation des taux dans le cas de prêts à taux révisables, prêts à annuités progressives (courants en France dans les années 1980), prêts non amortissables (ou prêts in fine) adossés à un produit d’épargne dont le rendement est inférieur à celui escompté (par exemple, les « endowment loans » populaires en Grande-Bretagne).
Au pire, et sans qu’il soit nécessaire pour cela d’avoir souscrit un prêt particulièrement risqué, l’investisseur peut n’être pas en mesure de faire face au remboursement : le prêteur a alors la possibilité faire saisir le bien et se dédommager sur le prix de la revente.

Jean Bosvieux
Décembre 2015
Révision février 2023

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Auteur/autrice

  • Jean Bosvieux

    Jean Bosvieux, statisticien-économiste de formation, a été de 1997 à 2014 directeur des études à l’Agence nationale pour l’information sur l’habitat (ANIL), puis de 2015 à 2019 directeur des études économiques à la FNAIM. Ses différentes fonctions l’ont amené à s’intéresser à des questions très diverses ayant trait à l’économie du logement, notamment au fonctionnement des marchés du logement et à l’impact des politiques publiques. Il a publié en 2016 "Logement : sortir de la jungle fiscale" chez Economica.

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